
Étude sur l'Anurie Obstructive et sa Prise en Charge
Informations sur le document
Langue | French |
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Taille | 5.67 MB |
- Anurie Obstructive
- Anatomie Rénale
- Prise en Charge Urgente
Résumé
I.Anurie Obstructive Physiopathologie et Conséquences
L'anurie obstructive, une urgence médicochirurgicale, résulte le plus souvent d'une insuffisance rénale aiguë. Elle est causée par une obstruction des voies urinaires, réduisant brutalement la filtration glomérulaire. Ceci entraîne une rétention de métabolites (urée, créatinine, potassium) compromettant le pronostic vital. Les causes principales sont le cancer pelvien (représentant jusqu'à 66% des cas selon certaines études) et la lithiase urinaire (jusqu'à 36% des cas). Des lésions anatomiques des cellules tubulaires, avec augmentation de la pression hydrostatique intratubulaire, contribuent à l'insuffisance rénale aiguë.
1. Définition et Urgence Médicochirurgicale
L'anurie obstructive est présentée comme une pathologie représentant le mécanisme le plus fréquemment impliqué dans le développement d'une insuffisance rénale aiguë. Le texte souligne son caractère d'urgence médicochirurgicale, exigeant un diagnostic précoce et une prise en charge rapide et adéquate pour contrer les désordres métaboliques potentiellement mortels. L'absence de production d'urine (anurie) est liée à une obstruction des voies urinaires, empêchant l'élimination normale des déchets métaboliques. Cette obstruction, si elle n'est pas traitée promptement, conduit à une accumulation de substances toxiques dans le sang, menaçant gravement le pronostic vital du patient. La rapidité d'intervention est donc primordiale pour éviter des complications irréversibles et préserver la vie du patient. Il s'agit d'une véritable course contre la montre pour rétablir la fonction rénale et éviter le décès.
2. Anatomie et Physiologie Rénale Pertinente
Une description anatomique du rein est fournie, le décrivant comme un organe en forme de haricot, avec des vaisseaux rénaux (artère et veine) et un bassinet se prolongeant par l'uretère. La structure fonctionnelle du rein, le néphron (50 mm de long), est détaillée, comprenant la capsule de Bowman, le glomérule (corpuscule de Malpighi), et le tube contourné proximal. Le fonctionnement de la voie excrétrice supérieure (VES) dépend de ses propriétés visco-élastiques et contractiles, permettant l'adaptation aux variations de volume et la propulsion de l'urine vers la vessie. L’obstruction urétérale ou intratubulaire cause une augmentation de la pression hydrostatique intratubulaire, réduisant ou annulant le gradient de pression et affectant la filtration glomérulaire. Le dépôt de substances anormales (chaînes légères d'immunoglobulines, cristaux, médicaments, débris cellulaires) dans les tubules augmente la pression, aggravant l'insuffisance rénale aiguë. Selon Thurau, une lésion anatomique des cellules tubulaires diminue la réabsorption proximale d'eau et de sodium, augmentant la quantité de sodium à la macula densa, stimulant la libération de rénine par l'appareil juxta-glomérulaire. Le rein maintient l'équilibre hydro-électrolytique et acido-basique.
3. Conséquences de l Obstruction sur le Rein
L'obstruction aiguë complète entraîne des conséquences fonctionnelles et macroscopiques significatives sur le rein. Macroscopiquement, les cavités rénales se dilatent, les papilles s'émoussent et le parenchyme rénal s'amincit. Cette atrophie progresse dans les premières semaines, plus intensément si l'obstruction est sévère, avant de se stabiliser. Fonctionnellement, l'altération des propriétés viscoélastiques du bassinet altère sa capacité à amortir les variations de volume et de pression. L’épithélium tubulaire s’atrophie, les cellules s’aplatissent, et les bordures en brosse disparaissent. Les tubules distaux se dilatent tandis que les proximaux se collabent du fait de la diminution de la filtration glomérulaire. Des lésions limitées sont réversibles, mais elles évoluent vers la fibrose. Concernant le débit sanguin rénal, une augmentation initiale dans le rein obstrué est suivie d'une diminution progressive (30% à 24h, 50% à 72h, 70% à 1 semaine, 80% à 2 semaines, 10% à 8 semaines). Une étude mentionne 13 patients (26%) ayant des antécédents de chirurgie urologique (néphrectomies, cures de lithiase, adénomectomie).
II.Diagnostic de l Anurie Obstructive
Le diagnostic repose sur l'examen clinique (douleurs lombaires, hématurie), des examens biologiques (élévation de l'urée et de la créatinine) et des examens d'imagerie. L'échographie abdominopelvienne est essentielle pour confirmer le diagnostic, identifier la dilatation des voies excrétrices et orienter vers l'étiologie (lithiase urinaire, tumeurs). L'AUSP peut identifier les lithiases oxalocalciques. La tomodensitométrie abdominopelvienne est utilisée lorsque l'échographie et l'AUSP sont non contributifs. Le toucher rectal et vaginal aident à détecter un éventuel « blindage pelvien», suggérant une étiologie néoplasique.
1. Examen Clinique et Biologique
Le diagnostic commence par un examen clinique minutieux. L'anurie, symptôme principal, est souvent associée à des douleurs lombaires (62% des cas dans l'étude citée) et une hématurie (24%). Ces informations cliniques orientent déjà vers une possible obstruction des voies urinaires. Parallèlement, des examens biologiques sont indispensables pour évaluer la gravité de l'atteinte rénale. L'élévation du taux d'urée et de créatinine confirme le dysfonctionnement rénal et renseigne sur le degré de sévérité de l'insuffisance rénale aiguë. Ces résultats biologiques sont cruciaux pour apprécier l'urgence de la situation et guider les décisions thérapeutiques ultérieures. Le toucher rectal et vaginal sont également mentionnés comme éléments importants de l'examen clinique, permettant notamment de détecter un éventuel « blindage pelvien » suggérant une étiologie néoplasique (cancer). Des études antérieures (Benghanem, Safi) ont montré une forte association entre le « blindage pelvien » et l'anurie néoplasique.
2. Imagerie Médicale Échographie et Autres Techniques
L'imagerie médicale joue un rôle central dans le diagnostic de l'anurie obstructive. L'échographie abdominopelvienne, réalisée chez presque tous les patients de l'étude (88%), confirme l'origine obstructive de l'anurie en visualisant la dilatation des voies excrétrices. Elle permet également d'orienter vers l'étiologie de l'obstruction, en identifiant des lithiases, des tumeurs (cancer du col, vessie, prostate), ou une hypertrophie prostatique. Dans cette étude, l'échographie a permis de confirmer le diagnostic dans 100% des cas. L'examen est également utilisé pour guider une éventuelle néphrostomie percutanée. Cependant, il existe un risque de faux positifs (5 à 20%) et de faux négatifs (environ 10%). L'abdomino-pelvienne est complétée par l’AUSP (appareil urologique standardisé portable), utile pour la détection de lithiases (75% des lithiases oxalocalciques sont identifiées par ce moyen). La tomodensitométrie abdominopelvienne (TDM), sans injection de produit de contraste iodé, est utilisée en urgence si le couple échographie/AUSP ne permet pas de préciser la nature ou le siège de l'obstruction. La TDM est particulièrement utile pour visualiser une lithiase bilatérale.
3. Autres techniques d imagerie et études
L'IRM ou uro-IRM, avec ou sans injection de gadolinium, est mentionnée comme une alternative au scanner, offrant une visualisation des voies excrétrices comparable à l’urographie intraveineuse (UIV), même en cas d’atteinte sévère de la fonction rénale. L'étude mentionne également la pyélographie descendante (PD), une technique de ponction percutanée d'un calice ou du bassinet pour opacifier la voie excrétrice et la drainer par une sonde de néphrostomie percutanée. Cette méthode est privilégiée si l'UPR n'est pas possible ou si l'obstruction est complète. L'étude rapporte les fréquences de différentes causes d'anurie obstructive: 47,7% selon une enquête de l'Association Française d'Urologie, 50% selon Colombeau, 66% selon Maillet, et 60% selon Benoit. Ces variations soulignent la complexité diagnostique et la nécessité d'une approche multimodale.
III.Traitement de l Anurie Obstructive
Le traitement de l'anurie obstructive est une urgence. Il vise à la fois à stabiliser l'état métabolique du patient et à lever l'obstruction. L'épuration extrarénale est parfois nécessaire. La levée de l'obstruction se fait principalement par une néphrostomie percutanée (NPC) ou une montée de sonde urétérale. La chirurgie peut être requise pour l'extraction de calculs ou le traitement de tumeurs. Le choix du traitement dépend de l'étiologie (lithiase, cancer) et de la sévérité de l'obstruction. Le drainage urinaire, qu'il soit interne (stent) ou externe (NPC), est crucial pour rétablir la diurèse.
1. Traitement d Urgence Épuration et Levées d Obstacles
Le traitement de l'anurie obstructive est une urgence vitale. Une première étape cruciale consiste à gérer les troubles métaboliques sévères. L'épuration extrarénale (dialyse) est parfois nécessaire pour éliminer les déchets accumulés et stabiliser l'état du patient. La levée de l'obstruction est ensuite primordiale pour restaurer la fonction rénale. Plusieurs techniques sont utilisées à cet effet. Dans une série de cas rapportée, une levée d'obstacle a été effectuée dans 96% des cas. La montée de sonde a été utilisée dans 17 cas, la néphrostomie percutanée (NPC) dans 24 cas, et une combinaison des deux techniques dans 5 cas. Dans 2 cas, une urétérostomie a été réalisée, et une intervention chirurgicale urgente pour le drainage et l'extraction de calculs a été effectuée dans un cas. Le choix de la technique dépend de la nature et de la localisation de l'obstruction, ainsi que de l'état du patient.
2. Néphrostomie Percutanée NPC et Autres Techniques de Drainage
La néphrostomie percutanée (NPC) est une technique de drainage fréquemment utilisée dans le traitement de l'anurie obstructive. Elle est réalisée sous contrôle échographique et peut être effectuée sous anesthésie locale. La NPC est particulièrement utile lorsque l'obstruction urétérale est complète et qu'une montée de sonde est impossible. Ses avantages incluent la simplicité, un coût réduit et une faible morbidité. De plus, elle permet d’étayer le diagnostic en précisant la nature de l’obstacle et de participer à la thérapeutique, notamment pour l’alcalinisation in situ des lithiases uriques et l’extraction de calculs. Autres techniques de drainage incluent la montée de sonde urétérale, qui est plus simple à mettre en place mais peut être inconfortable et présenter un risque de déplacement. L'antibioprophylaxie est recommandée pour prévenir la bactériémie, et un prélèvement bactériologique est systématique. Une étude de Takai sur 12 cas d'anurie obstructive liée à un cancer du col avancé rapporte 3 cas de drainage par montée de sonde et 11 cas par NPC.
3. Traitement Étiologique et Prise en Charge à Long Terme
Le traitement de l'anurie obstructive ne se limite pas au drainage. Un traitement étiologique est nécessaire pour s'attaquer à la cause sous-jacente de l'obstruction. Pour les cancers pelviens, le traitement peut être chirurgical (cystoprostatectomie radicale avec lymphadénéctomie pelvienne et dérivation urinaire de type Bricker, urétérostomie), endoscopique (résection avec sonde double J) ou une combinaison de ces techniques. Le traitement étiologique des anuries néoplasiques est souvent palliatif, consistant en un drainage urinaire externe définitif (NPC) ou interne (endoprothèse urétérale autostatique double J), avec un changement de sonde régulier en raison du risque de récidive tumorale. Les sondes doubles J métalliques permettent un drainage interne plus durable. Pour les lithiases urinaires, le traitement dépend de la nature de la lithiase (urique ou calcique) et des recommandations du CLAFU. La dissolution des calculs uratiques par bicarbonate est une option thérapeutique. L'intervention chirurgicale permet l'analyse morpho-constitutionnelle des calculs, facilitant l'établissement d'un traitement préventif.
IV.Évolution et Pronostic
L'évolution de l'anurie obstructive est variable. Dans une étude, 37 patients ont guéri, 10 ont présenté une insuffisance rénale résiduelle, et 2 une insuffisance rénale chronique terminale (IRCT). Le pronostic est lié à la cause de l'obstruction (cancer vs. lithiase) et à la rapidité de la prise en charge. Le traitement étiologique, notamment pour les cancers, est souvent palliatif, visant à améliorer la qualité de vie et à gérer les complications.
1. Évolution à Court Terme et Résultats d une Série de Cas
L'évolution à court terme de l'anurie obstructive, selon une série de cas rapportée, montre une grande variabilité des résultats. Trente-sept patients ont guéri complètement après le traitement. Dix patients ont présenté une insuffisance rénale résiduelle (IRR), avec une créatinémie stabilisée entre 24 et 26 mg/l. Deux patients ont développé une insuffisance rénale chronique terminale (IRCT) nécessitant une hémodialyse chronique. Une patiente, atteinte d'un cancer du col utérin avancé, est décédée durant son hospitalisation. Ces résultats soulignent la gravité potentielle de l'anurie obstructive et l'importance d'une intervention rapide et efficace. La guérison est possible dans un grand nombre de cas, mais une insuffisance rénale résiduelle ou terminale peut survenir dans certains cas, surtout en fonction de la cause sous-jacente de l'obstruction et de la rapidité du diagnostic et du traitement. Le pronostic est donc influencé par plusieurs facteurs, notamment le type et le stade de la pathologie responsable de l'obstruction.
2. Interventions Thérapeutiques Post Drainage
Après la stabilisation de la fonction rénale grâce au drainage urinaire (souvent via une néphrostomie percutanée ou une montée de sonde), différentes interventions thérapeutiques peuvent être nécessaires selon l'étiologie. Une coelioscopie a été pratiquée pour une lithiase de l'uretère lombaire après la restauration de la fonction rénale. Une urétéroscopie a été réalisée pour la cure d'un calcul pelvien. Une chirurgie, incluant urétérotomie, néphrotomie polaire supérieure, et pyélolithotomie, a été effectuée chez 4 patients pour l'extraction de lithiases. Dans le cas des cancers, la prise en charge post-drainage peut inclure une radiothérapie externe, une curithérapie, une chimioradiothérapie, ou une chimiothérapie exclusive. Dans une série de cas décrite, concernant des patientes atteintes d'un cancer du col très avancé, 5 patientes ont reçu une radiothérapie externe et une curithérapie, 3 une chimioradiothérapie, 2 une chimiothérapie exclusive, et 2 ont refusé tout traitement supplémentaire après stabilisation de la fonction rénale par drainage.
3. Considérations sur la Dérivation Urinaire et le Traitement Palliatif
La dérivation urinaire, comme solution à long terme, peut être déconseillée dans certains cas, notamment chez les patients ayant bénéficié de toutes les modalités thérapeutiques sans amélioration de l’évolution de leur cancer, ou lorsque la dérivation est perçue comme un acharnement thérapeutique. La qualité de vie du patient doit être prioritaire. Les options thérapeutiques vont de la résection endoscopique avec sonde double J à la cystoprostatectomie radicale avec dérivation urinaire externe (Bricker, urétérostomie). Pour les anuries néoplasiques, le traitement étiologique reste souvent palliatif, avec un drainage urinaire externe définitif par NPC ou interne par endoprothèse urétérale autostatique double J. Cependant, le taux de récidive tumorale est élevé, nécessitant un changement de sonde tous les 3 à 6 mois, bien que les sondes doubles J métalliques puissent rester en place plus longtemps (au moins un an). L'étude conclut que le traitement étiologique n’a pas été mené chez tous les patients, soulignant la complexité et l’individualisation des choix thérapeutiques en fonction du contexte.