Les Complications de la Chirurgie Traumato-Orthopédique chez le Sujet Âgé

Les Complications de la Chirurgie Traumato-Orthopédique chez le Sujet Âgé

Informations sur le document

Auteur

Mlle. Tadili Jinane

École

Université Cadi Ayyad, Faculté de Médecine et de Pharmacie Marrakech

Spécialité Médecine
Lieu Marrakech
Type de document thèse
Langue French
Format | PDF
Taille 1.01 MB
  • Chirurgie traumato-orthopédique
  • Sujet âgé
  • Complications médicales

Résumé

I.Le Vieillissement et ses Implications en Chirurgie Orthopédique Gériatrique

Ce document explore les défis de la chirurgie orthopédique gériatrique, en se concentrant sur les particularités du sujet âgé. Le vieillissement est présenté comme un processus irréversible impactant toutes les fonctions corporelles, accentuant la fragilité osseuse et cutanée et augmentant le risque de pathologies multiples (poly-pathologies) et de dépendance. L'étude souligne l'importance d'une approche multidisciplinaire et globale pour la prise en charge des patients âgés, notamment en cas de fractures, particulièrement celles de la extrémité supérieure du fémur (FESF). Une étude rétrospective portant sur 60 patients opérés à l'hôpital militaire de Marrakech pour des pathologies traumato-orthopédiques est mentionnée, soulignant le taux élevé de mortalité postopératoire (15%, dont 9.4% pour les FESF).

1. Le Vieillissement comme Processus Multifactoriel

Le document définit le vieillissement comme un processus continu, graduel et irréversible affectant toutes les structures et fonctions du corps. L'impact sur la qualité de vie est fortement influencé par le contexte socioculturel. Ce phénomène démographique majeur a des conséquences considérables, dépassant le simple aspect démographique pour impacter les domaines sanitaire, économique, social, culturel, psychologique et spirituel. L'augmentation de l'espérance de vie mondiale, une révolution en soi, transforme la structure familiale, particulièrement dans les pays en développement. La prise en charge du sujet âgé nécessite donc une approche globale, intégrant ces multiples dimensions. Il est souligné que la diminution des capacités physiques avec l'âge n'est pas systématiquement synonyme d'insuffisance, l'âge n'étant pas le seul facteur déterminant de la décompensation d'une fonction. Le déclin fonctionnel, bien que probablement programmé génétiquement, est accéléré par les maladies (l'hypertension artérielle, par exemple, accélère le vieillissement cardiovasculaire) et influencé par des facteurs endocriniens, nutritionnels et l'exercice physique. Une fonction non utilisée peut également décliner rapidement.

2. Le Vieillard Fragile et le Risque de Pathologies en Cascade

La perte des réserves adaptatives liée au vieillissement et aux maladies chroniques peut mener à un état de fragilité permanent caractérisé par une instabilité physiologique. Ces patients, incapables de s'adapter à un stress minimal, sont exposés à un risque élevé de pathologies en cascade, au pronostic grave. Des facteurs de risque sont identifiés: grand âge, poly-pathologies, polymédication, dépendance physique et psychique. L'intensité du stress initial (hospitalisation chirurgicale par exemple) et un environnement de soins inadéquat (formation insuffisante du personnel soignant, iatrogénie) exacerbent ce risque. La dimension psychologique est cruciale: la mort, l'angoisse et la dépression sont des réalités pour le sujet âgé malade, la peur de la mort étant exacerbée par la fragilité et la vulnérabilité face à la maladie. Certaines personnes âgées trouvent refuge dans la maladie, en particulier celles socialement isolées, le statut de malade leur permettant d'obtenir une attention et des soins. Une approche relationnelle positive, valorisant l'individu et son état de santé, est donc indispensable dans la prise en charge du vieillard fragile.

3. Mortalité et Fragilité en Chirurgie Orthopédique Gériatrique

Le sujet âgé est un patient potentiellement fragile, avec des capacités d'adaptation à l'effort très limitées. L'accumulation de pathologies accentue cette vulnérabilité et augmente le risque de mortalité. Une étude de la SOFCOT sur les fractures chez le sujet âgé (portant sur 60 patients de plus de 60 ans, opérés pour chirurgie orthopédique à Marrakech) a montré une mortalité globale de 15%, dont 9.4% chez les patients opérés pour une fracture de l’extrémité supérieure du fémur (FESF). Bien que non comparative, cette étude met en évidence le taux élevé de mortalité post-opératoire dans ce groupe de patients. Le document souligne la nécessité d'une approche plus précise et personnalisée pour minimiser ces risques. La fragilité du sujet âgé, aggravée par les conséquences du vieillissement et la présence de pathologies multiples, le rend particulièrement vulnérable et impose une vigilance accrue en chirurgie orthopédique. Les données spécifiques de l'étude de la SOFCOT à l'hôpital militaire de Marrakech sur 60 patients soulignent l'ampleur du problème.

II.Fractures du Col du Fémur chez la Personne Âgée Aspects Cliniques et Thérapeutiques

L'étude détaille les aspects cliniques et thérapeutiques des fractures du col du fémur, une pathologie fréquente chez les personnes âgées. Les difficultés diagnostiques, liées à la fiabilité limitée de l'interrogatoire et à la présence potentielle de syndromes fissuraires, sont soulignées. Les options thérapeutiques, notamment l'utilisation de prothèses cervico-céphaliques, sont discutées, ainsi que l'importance d'une prise en charge précoce pour réduire le risque de complications postopératoires. Le document met l'accent sur la nécessité d'une évaluation complète de l'état de santé du patient avant toute intervention chirurgicale afin de prévenir les risques associés à la polymédication et aux pathologies préexistantes.

1. Diagnostic des Fractures du Col du Fémur chez la Personne Âgée Les Pièges Cliniques et Radiologiques

L'identification des fractures du col du fémur chez les personnes âgées présente des difficultés spécifiques. L'anamnèse, souvent peu fiable en raison de la désorientation temporo-spatiale et de la perte de repères, rend difficile la détermination précise des circonstances du traumatisme et de sa date. Des pièges cliniques existent: les fractures de fatigue (ou fractures par insuffisance osseuse), souvent localisées au bassin, peuvent être confondues avec d'autres affections. L'impotence fonctionnelle variable, l'absence de chute, et une douleur dans les régions lombosacrée, fessière ou inguinale sans atteinte visible des hanches peuvent retarder le diagnostic. De même, les fissures du tibia distal simulées une entorse de la cheville, ou les gonalgies liées à une fissure du plateau tibial sont difficiles à identifier. La désorientation temporo-spatiale ou l'agitation peuvent être les seuls signes d'une fracture de l'odontoïde, étant parfois confondue avec un delirium tremens. Au niveau radiologique, le retard de diagnostic dans les syndromes fissuraires est courant, la scintigraphie, plus rapide, s'avérant précieuse. Des fractures des branches pubiennes peuvent ressembler à des tumeurs, même au scanner, imposant le diagnostic différentiel d'un chondrosarcome. Les fractures sans déplacement du col fémoral nécessitent parfois un recours à la scintigraphie ou à l'IRM pour confirmation.

2. Options Thérapeutiques et Prise en Charge Postopératoire

Le choix thérapeutique pour les fractures du col du fémur varie selon le type de fracture. Pour les fractures cervicales vraies, les prothèses cervico-céphaliques monobloc type Moore, avec ou sans ciment (selon l'état cardiaque), ou les prothèses intermédiaires à cupule (plus coûteuses mais plus durables) sont privilégiées. La prise en charge doit considérer l'autonomie et les capacités de déambulation préexistantes du patient. Une mobilisation et une verticalisation précoces sont essentielles pour prévenir les complications de décubitus et le syndrome de glissement. Les techniques chirurgicales doivent permettre un appui total lors de la reprise de la marche. Malgré l’augmentation constante de la pathologie traumatique gériatrique, le domaine reste complexe et comporte de nombreux pièges thérapeutiques. Un exemple est la luxation invétérée de l’épaule, irréductible orthopédiquement et difficilement réductible chirurgicalement, dont le traitement est souvent illusoire compte tenu de la bonne tolérance fonctionnelle habituelle. Le texte souligne l'importance de considérer l'état des articulations sus-jacentes, sous-jacentes et controlatérales lors des indications thérapeutiques.

III.Complications Postopératoires et Prévention chez le Sujet Âgé

Les complications postopératoires chez les patients âgés sont nombreuses et variées. Le document identifie les risques cognitifs, respiratoires, et thromboemboliques, insistant sur la nécessité d'une surveillance étroite. Des stratégies de prévention, incluant la mobilisation précoce, la prévention des escarres, le contrôle de la douleur et la prévention des troubles thromboemboliques, sont abordées. L'utilisation de différents traitements, tels que les anticoagulants, est évoquée, ainsi que l'importance de la surveillance clinique et biologique. Une étude cite un taux de transfusion de 40% chez les patients (selon l’étude ESCORTE).

1. Risques Cognitifs et Respiratoires Postopératoires

Les complications postopératoires chez les personnes âgées sont nombreuses et potentiellement graves. Le risque de dysfonction cognitive postopératoire (DCPOP) est significatif, avec des incidences de 25,8% à 7 jours et 9,9% à 3 mois post-opératoire selon l'étude prospective ISCPOD, comparé à 3,4% et 2,8% respectivement dans un groupe contrôle. Des facteurs préopératoires tels que l'anémie, l'insuffisance rénale, les antécédents neuropsychiatriques, et certains traitements (neuroleptiques, antidépresseurs) augmentent ce risque, de même que l'hypoxie et l'hypotension artérielle cérébrale. Concernant le risque respiratoire, bien que moins crucial dans cette chirurgie périphérique, le risque d'inhalation est augmenté chez les sujets âgés (RGO), pouvant conduire à une pneumopathie postopératoire fréquente. Il est important de connaître les effets néfastes imprévisibles des blocs médullaires élevés sur la mécanique ventilatoire et la toux.

2. Risques Thromboemboliques et Transfusionnels

Le risque thromboembolique est un autre élément crucial. Selon l'étude ESCORTE, 40% des patients sont transfusés, soulignant la potentialité hémorragique de la chirurgie traumatologique. Le choix du seuil transfusionnel reste débattu car c’est une décision complexe qui dépend de nombreux facteurs : le taux d'hémoglobine, la réserve cardiaque, l'estimation de la vitesse de saignement, et la tolérance clinique du patient. Les techniques de clampage réduisent le saignement, mais l'ischémie induite a des conséquences chez les personnes âgées. Les chirurgies lourdes, comme la pose de prothèses, nécessitent souvent des transfusions, parfois massives. La prévention des troubles thromboemboliques est donc capitale. Des moyens mécaniques (contention élastique, compression pneumatique intermittente, compression plantaire) sont utilisés, souvent associés à des traitements antithrombotiques (HNF, HBPM, AVK). La surveillance clinique et biologique est essentielle, notamment en cas d'insuffisance rénale sévère (clairance de la créatinine <30ml/min), où les HBPM sont contre-indiqués, nécessitant le recours aux AVK et HNF. Le risque hémorragique lié à ces traitements doit aussi être surveillé avec attention.

3. Autres Complications et Prévention Globale

D'autres complications postopératoires sont mentionnées, notamment les infections (2 infections superficielles sans démontage sur des ostéosynthèses ont été rapportées, guéries après reprise chirurgicale et antibiothérapie), et les échecs de fonction de l'anesthésie locorégionale (ALR), pouvant atteindre 17% et liés à l'arthrose lombaire, la position du patient et l'habileté du praticien. Les variations imprévisibles de la vasomotricité splanchnique liées à l'anesthésie rachidienne peuvent entraîner des complications cardiovasculaires. La prévention globale passe par une évaluation préopératoire rigoureuse pour identifier les patients à haut risque de décompensation (chutes, antécédents cardiaques, insuffisance rénale, polymédication). L'équipe soignante doit se concentrer sur la mobilisation précoce, la mise au fauteuil, puis à la marche, afin d'éviter le décubitus prolongé. Le monitorage cardio-respiratoire doit être permanent. La prévention mécanique des troubles thromboemboliques est détaillée avec l'utilisation de moyens mécaniques et/ou de traitements antithrombotiques, le choix dépendant de la balance bénéfice/risque. La prévention des escarres est cruciale et nécessite une surveillance régulière de la peau, des changements de position fréquents et l'utilisation de supports adaptés. La gestion de la douleur est également primordiale, les personnes âgées ressentant la douleur de la même manière que les sujets plus jeunes, mais avec des conséquences plus délétères.

IV.Approche Multidisciplinaire et Prévention de la Dépendance

La prise en charge optimale du sujet âgé après une intervention chirurgicale orthopédique exige une approche multidisciplinaire qui intègre les aspects médicaux, psychologiques et sociaux. La prévention de la perte d'autonomie et le soutien psychologique sont essentiels pour améliorer la qualité de vie. Le document souligne l'importance d'une évaluation rapide et complète de l'état du patient pour identifier les facteurs de risque de décompensation et adapter la stratégie thérapeutique. La priorité est donnée à une intervention ciblée pour améliorer la qualité de vie et prévenir les rechutes. L’étude mentionne des données collectées à Marrakech à l’hôpital militaire.

1. Évaluation Préopératoire et Stratégie de Prise en Charge

Une approche multidisciplinaire est essentielle pour la prise en charge du sujet âgé, notamment en chirurgie orthopédique. Avant de mettre en place des protocoles de soins, une stratégie globale doit être définie, incluant une évaluation rapide et complète de l'état de santé du patient. Cette évaluation doit identifier les patients à risque élevé de décompensation, tels que ceux ayant subi une chute, ceux présentant des antécédents de décompensation cardiaque ou une fonction rénale limitée, ainsi que ceux sous polymédication. Une préparation personnalisée, tenant compte des spécificités de chaque patient, est indispensable. Le choix de l'anesthésie doit être adapté au terrain et à la chirurgie envisagée. L'objectif est d'optimiser la prise en charge, non seulement sur le plan diagnostique et thérapeutique, mais aussi psychologique et social afin de prévenir la dépendance.

2. Prévention de la Perte d Autonomie et Soutien Psychologique

La prévention de la perte d'autonomie est fondamentale, dès le premier jour d'une affection aiguë. L'équipe soignante doit maximiser le développement et l'utilisation des capacités restantes du patient. Un soutien psychologique systématique est indispensable, visant à prévenir la régression, à aider le patient à faire son deuil de la fonction perdue et à développer des activités de compensation. Certaines investigations, comme l'appareillage pour amputation, contribuent à lutter contre l'isolement social, tandis que d'autres, comme la réalisation d'un TDM ou d'une IRM à la recherche de métastases chez un patient cachectique atteint d'une néoplasie incurable, doivent être évaluées attentivement au regard du rapport bénéfice/risque. Le consentement éclairé du patient concernant le projet de soins est absolument indispensable à toutes les étapes de la prise en charge.

3. Démarche Diagnostique et Thérapeutique Prioriser l Amélioration de la Qualité de Vie

Face à la multiplicité des diagnostics possibles chez un même patient, une hiérarchisation est nécessaire. Les diagnostics «rentables», c'est-à-dire ceux qui mènent à une amélioration significative de l'état de santé et de la qualité de vie, doivent être privilégiés. Par exemple, l'intervention sur une arthrose de hanche peut limiter le risque de rechute. La prise en charge doit inclure un programme nutritionnel adapté et une remise en charge précoce par le contrôle de la douleur postopératoire. L'évaluation constante du rapport bénéfice/risque de chaque procédure est cruciale. Concernant l'anesthésie, le texte souligne qu'il n'y a pas de supériorité d'une technique sur l'autre en termes de morbidité et de mortalité, la rigueur de l'administration et la qualité de l'environnement périopératoire (stress, réchauffement, réanimation) étant les facteurs déterminants. L'accent est mis sur l’importance du choix de l’anesthésiste.