Profil Épidémiologique de la Rectocolite Hémorragique

Profil Épidémiologique de la Rectocolite Hémorragique

Informations sur le document

Auteur

Mme. Manal Hajjou

subject/major Médecine
Type de document Thèse
Langue French
Format | PDF
Taille 1.65 MB
  • Épidémiologie
  • Rectocolite hémorragique
  • Médecine

Résumé

I.Définition et Épidémiologie de la Rectocolite Ulcéro Hémorragique RCH

Cette étude rétrospective, portant sur 60 cas de rectocolite ulcéro-hémorragique (RCH) au CHU Mohammed VI de Marrakech, vise à évaluer le profil épidémiologique de cette maladie inflammatoire chronique de l'intestin (MICI) au Maroc. L'âge moyen des patients était de 38 ans (19-66 ans) avec une prédominance féminine. Le délai diagnostique moyen était de 6 mois. Le Maroc, considéré comme un pays à faible incidence de RCH, montre une similarité avec les données internationales quant à l'âge de survenue de la maladie. L'étude explore les facteurs de risque, notamment le tabagisme, et l'antécédent familial de MICI, soulignant la complexité du diagnostic différentiel avec la maladie de Crohn.

1. Présentation de l étude et Méthodologie

L'étude est une analyse rétrospective de 60 cas de rectocolite ulcéro-hémorragique (RCH) suivis sur cinq ans au service d'hépato-gastro-entérologie du CHU Mohammed VI de Marrakech. Le diagnostic reposait sur un ensemble d'arguments épidémiologiques, cliniques, endoscopiques, histologiques et évolutifs. La période de suivi des patients était en moyenne de 12 mois. L'analyse a été effectuée à partir d'une fiche d'exploitation des dossiers médicaux, permettant d'analyser des données démographiques, cliniques et évolutives. L'objectif était d'évaluer le profil épidémiologique de la RCH au Maroc, un pays considéré comme ayant une faible incidence de cette maladie inflammatoire chronique de l'intestin (MICI).

2. Définition et historique de la RCH

La RCH est définie comme une maladie évolutive à poussées, affectant une partie ou la totalité du côlon sans atteindre l'intestin grêle, prédominant au niveau du rectum et de la muqueuse superficielle. L'aspect rectoscopique est caractérisé par une vasodilatation intense, un œdème, des hémorragies et une hypersécrétion de mucus. La maladie est connue depuis longtemps en France et dans les pays anglo-saxons. Dès 1935, Delarue et Busson employaient le terme de rectocolite hémorragique, soulignant l'atteinte rectale quasi-constante, bien étudiée par Raoul Bensaude en rectoscopie. La recherche étiologique se poursuit, les progrès récents en génétique et immunologie contribuant à une meilleure compréhension de la physiopathogénie.

3. Facteurs de risque et Épidémiologie au Maroc

La répartition géographique de la RCH est inégale, plus fréquente dans les pays occidentaux. Le Maroc est considéré comme un pays à faible incidence. Bien que l'étiologie exacte reste obscure, l'étude explore le rôle potentiel de facteurs génétiques et environnementaux. Le tabagisme apparaît comme un facteur de risque potentiel, plusieurs études citées montrant une association entre tabagisme actif ou passé et la RCH. L'étude porte également sur l'antécédent familial de MICI (Maladie Inflammatoire Chronique de l'Intestin), soulignant des cas familiaux avec atteinte des parents de premier degré observés dans différentes séries marocaines et internationales, mais sans une fréquence significativement plus élevée. La difficulté d'obtenir des données épidémiologiques fiables dans des pays en voie de développement, notamment à cause de l'absence de système de sécurité sociale complet, est soulignée.

4. Données Épidémiologiques de l étude Marrakchie

L'étude de Marrakech révèle un pic de fréquence de la RCH entre 21 et 35 ans, avec un âge moyen de 38 ans (extrêmes : 19 à 66 ans) et une prédominance féminine. Ces résultats sont comparés à d'autres séries marocaines et internationales, montrant une certaine similarité concernant l'âge de début de la maladie. Le délai entre l'apparition des premiers symptômes et le diagnostic est variable, allant jusqu'à plusieurs années. Ce retard est attribué à la confusion possible avec d'autres affections infectieuses et proctologiques. L'étude note une similarité entre les résultats obtenus et les données de la littérature nationale et internationale concernant l'âge de survenue et d'autres facteurs, confirmant ainsi la pertinence du travail effectué au niveau du CHU Mohammed VI de Marrakech.

II.Signes Cliniques et Diagnostic de la RCH

Le symptôme principal de la RCH est la diarrhée hémorragique, présente chez 93% des patients. Une localisation rectale isolée a été observée dans 65% des cas. Des manifestations extra-intestinales, principalement des arthralgies (40% des cas), ont été notées. Le diagnostic de RCH repose sur un faisceau d'arguments cliniques, endoscopiques (coloscopie), anatomopathologiques (biopsie), et évolutifs. L'étude précise l'importance des examens complémentaires pour éliminer une colite infectieuse, notamment l'amibiase intestinale, une association décrite dans la littérature (81 cas sur 146 dans une étude citée).

1. Signes Digestifs de la RCH

La diarrhée est le symptôme initial le plus fréquent (près de la moitié des cas), devenant quasiment universelle au cours de l'évolution. Son intensité est variable, allant de diarrhée modérée, principalement matinale ou post-prandiale, à une diarrhée majeure avec de nombreuses selles impérieuses, diurnes et nocturnes. Des selles glairo-sanglantes et purulentes peuvent apparaître dans les formes plus étendues. Les douleurs abdominales sont souvent post-prandiales, localisées dans la fosse iliaque gauche, sous forme de crampes ou plus diffuses. Dans les cas sévères, elles peuvent être intenses. Dans la série étudiée, des anomalies de la marge anale, telles que des fissures anales (7 cas sur 60), ont été observées chez 22% des patients. L'examen au toucher rectal peut révéler une muqueuse rectale granuleuse et irrégulière, avec parfois des pseudo-polypes, et la présence de sang, de glaires et parfois de pus. Des nausées, anorexie, asthénie et amaigrissement, associés à de la fièvre, sont des signes généraux importants dans les poussées sévères.

2. Manifestations Extra intestinales et Examen Complémentaires

Des manifestations extra-intestinales, principalement des arthralgies, ont été observées chez 40% des patients. D'autres atteintes, notamment oculaires (diminution de l'acuité visuelle, sensation de mouches volantes), sont beaucoup plus rares. La colonoscopie permet de déterminer l'étendue des lésions muqueuses, distinguant une forme distale (atteignant au maximum l'angle colique gauche, incluant rectite et colite gauche) et une forme plus étendue. Dans cette étude, l'anatomopathologie était compatible avec une RCH dans 95% des cas, montrant des altérations épithéliales muqueuses, des abcès cryptiques et des infiltrats inflammatoires du chorion, observations cohérentes avec d'autres études marocaines. L'examen microbiologique des selles (examen direct, coproculture, examen parasitologique) est indiqué pour éliminer une colite infectieuse, en particulier l'amibiase intestinale, dont l'association avec la RCH est connue. Dans cette étude, l'examen parasitologique des selles a révélé 7 cas d'Entamoeba histolytica pathogènes et 20 cas de formes kystiques sur 50 patients testés.

3. Imagerie et Diagnostic Différentiel

L'échographie, examen non invasif et peu coûteux, peut montrer un épaississement pariétal circonférentiel de la paroi colique, reflétant l'inflammation. Le diagnostic différentiel avec la maladie de Crohn est parfois difficile. La diarrhée étant un symptôme commun, le caractère hémorragique de la RCH (90% des cas) est un élément important de distinction. Les douleurs abdominales sont plus fréquentes dans la maladie de Crohn. La présence de lésions anopérinéales (fistules et abcès) est très évocatrice de la maladie de Crohn. L'endoscopie peut aussi aider au diagnostic différentiel en montrant des lésions hétérogènes avec intervalles de muqueuse saine, des fissurations en «pavé» et des ulcérations aphtoïdes, absentes dans la RCH. Un syndrome dysentérique avec rectorragie doit mener à un examen endoscopique pour éliminer d'autres lésions coliques, même si des pathologies hémorroïdaires et fissuraires sont fréquentes.

III.Traitement et Évolution de la RCH

La prise en charge de la RCH est multidisciplinaire et dépend de la sévérité de la poussée et de l'étendue des lésions. L'étude utilise l'indice de Truelove et Witts pour évaluer la sévérité des poussées (65% modérées dans cette étude). Le traitement médical inclut des anti-inflammatoires, et les nouvelles biothérapies (anticorps anti-TNF alpha) sont mentionnées. Le traitement chirurgical, notamment la colectomie, est évoqué pour les cas sévères ou réfractaires. L'évolution des patients de cette série était généralement favorable. Les complications potentielles comme le mégacôlon toxique et le risque de cancer colorectal à long terme sont discutées.

1. Traitement Médical de la RCH

La prise en charge de la rectocolite ulcéro-hémorragique (RCH) nécessite des compétences médicales et chirurgicales. Une meilleure connaissance de la physiopathologie des maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (MICI) a permis le développement de nouvelles cibles thérapeutiques et de nouveaux traitements. Malgré ces progrès, le risque de complications demeure, affectant la qualité de vie et le pronostic vital. Le texte mentionne les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), soulignant leur potentiel à déclencher des poussées de RCH, voire la maladie elle-même, en altérant la barrière muqueuse intestinale. L'implication probable d'antigènes alimentaires dans la pathogenèse des MICI est également évoquée, expliquant la variabilité de l'incidence géographique. Des données récentes montrent l'efficacité des anticorps anti-TNF alpha, comme l'infliximab, dans le traitement de la RCH réfractaire et sévère, ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) en avril 2006. Les ralentisseurs du transit intestinal (narcotiques) sont contre-indiqués en raison du risque de mégacôlon toxique.

2. Traitement Chirurgical et Complications

Le traitement chirurgical de la RCH vise à enlever la muqueuse colorectale malade, en préservant la qualité de vie. Diverses techniques chirurgicales existent, les plus récentes privilégiant des procédés de reconstruction pour maintenir la continence. La mortalité liée aux interventions chirurgicales (AIR ou AIA) en contexte électif ou à distance de la colectomie est devenue faible. Cependant, une morbidité précoce de l'ordre de 10% est observée. Les complications mécaniques à long terme incluent l'occlusion, la sténose de l'anastomose et le sepsis pelvien chronique. L'étude mentionne l'absence de perforation colique dans la série étudiée, contrairement à d'autres études (S. Nadir et al., trois cas mortels). Le mégacôlon toxique, défini par une dilatation colique supérieure à 6 cm (ou 5 cm au niveau du côlon gauche, 7 cm pour le transverse et le côlon droit selon certains auteurs) associée à un tableau clinique grave et des signes de sepsis, est une complication rare, notée dans une seule observation d'une autre série (Essaid et al.). Les hémorragies massives sont également rares et nécessitent une intervention chirurgicale en cas d'anémie aiguë ou de transfusions répétées.

3. Évolution Facteurs de Rechute et Cancer Colorectal

L'évolution la plus fréquente de la RCH est un mode intermittent, avec alternance de poussées et de rémissions. L'identification de facteurs prédictifs de rechute chez les malades en rémission est importante pour définir une population à risque justifiant un traitement de maintien. Le risque de cancer colorectal est estimé à 2% après 10 ans d'évolution et à 8% après 30 ans. Des facteurs de risque sont identifiés : durée d'évolution, jeune âge, colite étendue, antécédents familiaux. Le diagnostic est difficile, les symptômes pouvant être masqués par la colite, et les lésions endoscopiques et radiologiques n'étant pas spécifiques. La dysplasie, lésion montrant une transformation néoplasique de l'épithélium non invasive, est un marqueur histologique important, mais son diagnostic est difficile et nécessite confirmation par un second anatomo-pathologiste. Le score de Truelove et Witts est utilisé pour évaluer la sévérité des poussées, permettant de différencier les poussées légères, modérées et sévères.

IV.Diagnostic Différentiel et Mortalité

Le diagnostic différentiel avec la maladie de Crohn est crucial, car les deux maladies partagent des symptômes. La présence de lésions anopérinéales et l'aspect endoscopique des lésions permettent de différencier les deux. La mortalité chez les patients atteints de RCH semble comparable à celle de la population générale, une étude citée indiquant un âge moyen de décès de 70 ans pour les hommes et 75 ans pour les femmes.

1. Diagnostic Différentiel avec la Maladie de Crohn

Le diagnostic différentiel entre la rectocolite ulcéro-hémorragique (RCH) et la maladie de Crohn (MC) peut être difficile, l'évolution clinique jouant parfois un rôle déterminant. La diarrhée est un symptôme commun aux deux maladies, mais le caractère hémorragique est plus fréquent dans la RCH (90% des cas), permettant une première distinction. Les douleurs abdominales sont plus fréquentes dans la MC. Des lésions anopérinéales (fistules et abcès) sont fortement évocatrices de la MC. L'endoscopie permet de visualiser les lésions : des lésions hétérogènes avec des intervalles de muqueuse saine, un aspect en «pavé» et des ulcérations aphtoïdes sont caractéristiques de la MC et absentes dans la RCH. Devant une rectorragie et un syndrome dysentérique, il est crucial d'éliminer d'autres causes organiques par un examen endoscopique, même si les pathologies hémorroïdaires et fissuraires sont fréquentes.

2. Scores Cliniques et Biologiques

L'évaluation de la sévérité de la RCH utilise des scores cliniques et biologiques. L'indice d'activité de Truelove et Witts, basé sur cinq données cliniques et biologiques, permet de distinguer les poussées sévères des poussées légères et d'évaluer l'efficacité du traitement. L'indice de Seo est un autre outil d'évaluation, principalement utilisé pour les poussées modérées. Il permet une classification en poussées légères, modérées et sévères, corrélée à la classification de Truelove et Witts. Ces indices sont importants pour la prise de décision thérapeutique et l'indication chirurgicale précoce, contribuant à la baisse de la mortalité des formes sévères. L'étude note que dans leur série, 65% des patients présentaient des poussées de sévérité modérée.

3. Mortalité liée à la RCH

La mortalité chez les patients atteints de RCH semble comparable à celle de la population générale. Une étude mentionnée montre un âge moyen de décès de 70 ans pour les hommes et 75 ans pour les femmes. Cependant, des complications graves comme le mégacôlon toxique, les hémorragies massives, et la perforation colique, peuvent affecter le pronostic vital. L'étude de Marrakech note l'absence de cas de perforation colique dans sa série, tandis que d'autres études (S. Nadir et al.) ont rapporté trois cas mortels de perforation colique. Le risque de cancer colorectal est un autre facteur influant sur la mortalité à long terme, estimé à 2% après 10 ans d'évolution et à 8% après 30 ans. La durée de la maladie, le jeune âge, une colite étendue et les antécédents familiaux sont des facteurs de risque identifiés.