La Perception Sémantique : Une Exploration des Concepts et des Structures

La Perception Sémantique : Une Exploration des Concepts et des Structures

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Langue French
Format | PDF
Taille 1.94 MB
Type de document thèse
  • sémantique
  • grammaire cognitive
  • perception

Résumé

I.La Phénoménologie la Grammaire Cognitive et la Sémantique Interprétative Une Approche Comparée de la Signification

Cet article explore les points de convergence et de divergence entre trois cadres théoriques majeurs: la phénoménologie (Husserl, Heidegger), la grammaire cognitive (Langacker) et la sémantique interprétative (Rastier). L'analyse se centre sur la signification, en interrogeant les modèles logico-analytiques classiques à la lumière d'une approche plus sensible à la perception sémantique. La théorie du champ de la conscience de Gurwitsch sert de pont entre ces perspectives, soulignant l'importance du thème, du champ thématique, et de la marge dans l'organisation de la conscience et de la compréhension. L'étude aborde des concepts clés tels que la cohérence de forme, la distinction entre constituants et éléments, et l'analyse de la Gestalt pour mieux comprendre la complexité du sens.

1. Phénoménologie et Approches de la Signification

Cette section pose les bases de l'étude en introduisant les concepts clés de la phénoménologie de Husserl et Heidegger. Elle souligne la différence entre une approche logico-analytique de la signification, qui se concentre sur la vérité et les conditions de vérité, et une approche phénoménologique, qui accorde une importance cruciale à la perception et à l'expérience vécue. L'épochè, la suspension du jugement, est présentée comme une méthode permettant de mettre entre parenthèses les présupposés de l'attitude naturelle pour accéder à la structure intentionnelle de la conscience (noèse/noème). L'objectif n'est pas de nier ou d'affirmer l'existence du monde extérieur, mais de suspendre le jugement sur son existence pour mieux comprendre comment il nous apparaît. La flexibilité sémantique, souvent négligée par les approches formalistes comme celle de Frege, est identifiée comme un élément central de la compréhension de la signification, en lien avec l'aspect quasi-matériel du langage. L'inadéquation des modèles de sémantique formelle pour rendre compte de la richesse et de la complexité du langage naturel est pointée du doigt, ouvrant la voie à des approches alternatives plus attentives à la dimension perceptive et subjective du sens.

2. Grammaire Cognitive et Sémantique Interprétative Points de Contact et Divergences

Cette partie compare les cadres théoriques de la grammaire cognitive (CG) et de la sémantique interprétative (SI), mettant en avant leurs points communs et leurs différences dans l'analyse de la signification. La CG, notamment par le travail de Langacker, privilégie une approche usage-based et s'intéresse aux processus cognitifs sous-jacents à la construction du sens, notamment au rôle de la perception et aux mécanismes de profilage. La SI, quant à elle, développée par Rastier, se concentre sur l'analyse du texte et la notion d'isotopie. Bien que leurs méthodes et leurs outils de représentation diffèrent (diagrammes en CG vs. graphes en SI), les deux approches convergent sur l'importance de la perception sémantique et reconnaissent une dimension non strictement logico-analytique du sens. La notion de forme sémantique est mise en avant comme un point de convergence, soulignant la nécessité de dépasser les clivages traditionnels entre sensible et intelligible. L’article explore les liens entre les deux approches, notamment leur intérêt pour l'analyse de corpus et leur utilisation de statistiques (textométrie pour la SI, quantitative corpus analysis pour la CG). La Gestalt, l’approche connexionniste et la notion de saillance sont également évoquées comme des concepts importants dans l’analyse du sens pour les deux approches.

3. La Théorie du Champ de la Conscience de Gurwitsch Un Modèle Intégrateur

Cette section introduit la théorie du champ de la conscience de Gurwitsch comme un cadre théorique unificateur pour rapprocher la phénoménologie, la grammaire cognitive, et la sémantique interprétative. Gurwitsch propose un modèle tripartite (thème, champ thématique, marge) pour analyser l'organisation de la conscience et son rapport à l'objet. L'articulation thème/champ thématique est comparée au rapport figure/fond de la Gestalt, soulignant la transposabilité du thème dans différents contextes. L'analyse de la cohérence de forme dans la définition du thème est explorée, et cette notion est mise en relation avec la notion de molécule sémique en sémantique interprétative. L’article discute des limites de la transposabilité du thème dans des contextes radicalement différents, montrant les nuances de l’application du modèle de Gurwitsch. La notion de forme sémantique forte, liée à la cohérence de forme, est introduite comme un concept crucial pour comprendre l’autonomie sémantique de certains énoncés, notamment des proverbes.

II.La Cohérence de Forme et les Formes Sémantiques Fortes L Exemple des Proverbes

L'article propose une définition de la cohérence de forme comme critère fondamental pour identifier les formes sémantiques fortes. Les proverbes servent d'illustration privilégiée, caractérisés par leur autonomie sémantique et leur transposabilité à différents contextes. À l'inverse, des exemples de jeux surréalistes sont analysés pour mettre en évidence l'absence de cohérence de forme. Cette analyse contraste avec des approches basées sur la fréquence lexicale ou l'entrenchment psychologique, démontrant la supériorité d'une approche centrée sur l'organisation interne des molécules sémiques.

1. Définition de la Cohérence de Forme et des Formes Sémantiques Fortes

Cette section introduit le concept central de Cohérence de Forme, une notion qui décrit l'unité interne et l'organisation d'une structure sémantique. Elle est définie en opposition à une simple juxtaposition d’éléments, mettant l’accent sur l’interdépendance fonctionnelle des parties constitutives. Le texte établit un lien direct avec la théorie de la Gestalt, en soulignant que l’unité d’une forme sémantique forte ne résulte pas d’un principe extérieur mais de son organisation intrinsèque, similaire à la cohésion des formes perceptives. La cohérence de forme est présentée comme un critère essentiel pour distinguer les formes sémantiques fortes, qui possèdent une autonomie sémantique et une grande transposabilité, des formes faibles, dépourvues de cette cohésion interne. L’analyse se base sur la théorie du champ de la conscience de Gurwitsch, notamment sur la notion de thème et son organisation interne, pour justifier cette distinction. L'objectif est de dépasser les explications basées sur la fréquence ou l'entrenchment psychologique (psychologisme), souvent associées à la notion de forme sémantique, et de fonder l’analyse sur des critères purement structurels et internes.

2. Les Proverbes comme Exemples de Formes Sémantiques Fortes

Cette partie utilise l'exemple des proverbes pour illustrer le concept de forme sémantique forte. Le texte argumente que la transposabilité des proverbes à différents contextes ne repose pas sur une simple adaptation de leur signification mais sur la cohésion interne et l'autonomie de leur structure sémantique. La cohérence de forme est ici le critère déterminant : les éléments du proverbe sont liés par des relations intrinsèques, sans recours à des éléments externes. L'analyse examine la structure des molécules sémiques lexicalisées par les proverbes, montrant comment leurs composantes sémantiques s'articulent de manière cohérente et auto-suffisante. Le texte réfute l'idée que la fréquence d'utilisation serait un facteur déterminant pour le statut de proverbe, en proposant des exemples de phrases originales, peu ou pas utilisées, mais qui possèdent les mêmes caractéristiques de transposabilité que les proverbes officiels. Le corpus frTenTen, contenant près de 10 milliards de mots, est mentionné pour illustrer l’absence d’occurrence de certains proverbes malgré leur inclusion dans des dictionnaires officiels, tandis que des exemples de formulations non-officielles mais fréquentes sont également présentés, démontrant la complexité de l'analyse.

3. Contraste avec des Structures Dépourvues de Cohérence de Forme

Pour mieux cerner la notion de cohérence de forme, cette section présente un exemple contrastant : le jeu surréaliste « l’un dans l’autre ». Ce jeu propose des descriptions énigmatiques, où un mot cible doit être deviné à partir d'indices contextuels. L’analyse démontre que, contrairement aux proverbes, ces descriptions ne manifestent pas de cohérence de forme. Les éléments de la description sont des indices isolés, imposés par le contexte, sans lien fonctionnel intrinsèque entre eux, créant un ensemble non unifié. Ceci contraste fortement avec la nature interne et auto-suffisante des formes sémantiques fortes illustrées par les proverbes. L’exemple du jeu surréaliste sert ainsi à mettre en lumière le caractère spécifique et essentiel de la cohérence de forme dans la constitution des formes sémantiques fortes. Le texte souligne la différence entre une structure sémantique unifiée par une relation interne (proverbe) et une simple somme d’éléments contextuels (jeu surréaliste), illustrant ainsi la pertinence du concept de forme forte dans l’analyse sémantique.

III. Grammaire Cognitive et Sémantique Interprétative Similitudes et Différences dans la Modélisation du Sens

La comparaison des outils de représentation utilisés en grammaire cognitive (schémas de profilage, balayage cumulatif) et en sémantique interprétative (molécules sémiques, graphes) révèle des similitudes surprenantes. Malgré des différences terminologiques et des approches distinctes (intégration/unification vs. diffusion/propagation), les deux cadres partagent une capacité d'abstraction formelle. Cette capacité à identifier un niveau grammatical a priori, préliminaire à la logique de la vérité, est en accord avec la conception hiérarchique de la logique chez Husserl (grammaire a priori, logique de la non-contradiction, logique de la vérité).

1. Comparaison des outils et concepts de la Grammaire Cognitive et de la Sémantique Interprétative

Cette section analyse les similarités et les différences entre les outils et concepts utilisés par la Grammaire Cognitive (CG) et la Sémantique Interprétative (SI) pour modéliser le sens. Elle souligne que malgré des différences apparentes dans les systèmes de représentation (diagrammes en CG, graphes en SI), une schématicité commune permet l'abstraction de structures indépendantes de tout domaine particulier. La CG utilise des concepts tels que le profilage, le cumulative scanning, et la zone active pour analyser la compositionnalité et la construction du sens, alors que la SI fait appel aux notions de sèmes, molécules sémiques, et isotopies génériques. Malgré ces différences terminologiques, une comparaison entre les schémas des noms d’action en CG et les molécules sémiques en SI révèle une convergence dans leur capacité à abstraire des structures transposables à différents domaines. L'opposition entre une compositionnalité basée sur la diffusion/propagation de sèmes en SI et un processus d’intégration/unification en CG est également mise en évidence, soulignant des perspectives différentes sur la formation du sens.

2. Convergence sur un Niveau Formel a priori Au delà de la description logico analytique

L’analyse souligne une convergence fondamentale entre la Grammaire Cognitive et la Sémantique Interprétative : la mise en lumière d’un niveau formel a priori de la signification, indépendant de la description logico-analytique. Ce niveau, identifié comme préliminaire à la logique de la vérité, englobe des concepts partagés comme l'articulation figure/fond, la saillance, le profilage, la cohérence de forme, et les processus de dissimilation et assimilation de sèmes. Cette perspective rejoint la vision stratifiée de la logique chez Husserl, avec une grammaire a priori fondamentale qui sous-tend les niveaux logiques supérieurs de la non-contradiction et de la vérité. La schématicité des modèles, tant en CG qu'en SI, est présentée comme une caractéristique essentielle de cette capacité d’abstraction formelle, permettant la construction de représentations indépendantes de toute matière concrète. Le texte explique que l’aptitude commune à abstraire des représentations indépendantes de toute matière concrète permet de mettre à jour l’existence d’un niveau grammatical/sémantique a priori qui précède le niveau logique à proprement parler.

IV.Prédicats Vagues et le Paradoxe du Sorite Une Analyse Phénoménologique

L'article examine les prédicats vagues et leur pertinence pour l'analyse phénoménologique de la signification. Le paradoxe du Sorite est utilisé pour illustrer la difficulté de définir des limites claires dans certains domaines sémantiques. L'analyse met en lumière l'importance de la distinction entre constituants et éléments pour une compréhension précise du sens, et remet en question les modèles qui supposent une identité entre les éléments (hypothèse de la constance).