De la Black Consciousness à la Nouvelle Afrique du Sud  : enjeux d'une poésie engagée

Poésie engagée en Afrique du Sud

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Langue French
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Taille 1.74 MB

Résumé

I.La poésie de la Conscience Noire et la lutte contre l apartheid en Afrique du Sud

Ce document analyse le rôle crucial de la poésie dans le mouvement de la Conscience Noire sud-africaine comme forme de résistance à l'apartheid. Il explore comment les poètes noirs se sont appropriés la langue anglaise, initialement langue du colonisateur, pour subvertir le discours dominant et exprimer leur expérience de l'oppression. Des figures clés comme Steve Biko et l'influence de Frantz Fanon sont examinées. L'étude se concentre sur l'utilisation de la langue comme arme politique, la transformation des structures linguistiques et la création d'un nouvel humanisme noir. L'importance de la tradition orale et la relation complexe entre oralité et écriture sont soulignées. Le contexte de censure et d'exil est également exploré.

1. Le contexte historique et politique de la Black Consciousness

Cette section pose les bases du mouvement de la Black Consciousness en Afrique du Sud, soulignant son émergence en réaction à l'oppression de l'apartheid. L'étude souligne le rôle de la langue, notamment l'anglais et l'afrikaans, comme instruments politiques et symboliques de domination et de résistance. L'anglais, bien qu'ayant servi d'outil d'alphabétisation et d'émancipation grâce aux mission schools britanniques, restait la langue du colonisateur, son apprentissage souvent forcé par nécessité économique. En contraste, l'afrikaans, langue de la ségrégation et de l'oppression la plus brutale durant l'apartheid, a suscité des réactions violentes, comme les émeutes de Soweto en 1976, consécutives à son imposition partielle dans les écoles noires. Le choix de l'anglais comme langue d'écriture pour les auteurs noirs sud-africains est présenté comme un acte politique conscient, une stratégie pour s'emparer d'un outil de domination et le retourner contre le système. La citation de Njabulo Ndebele, « the closed epistemological structures of South African oppression », illustre la nature omniprésente de l'oppression et la nécessité d'une contestation radicale, y compris au niveau linguistique. L'étude aborde la question du public et de la portée internationale de l’écriture en anglais, outil de déstabilisation de l'ordre établi par la diffusion de la réalité sud-africaine à travers la littérature. L'appropriation de la langue anglaise par les poètes est décrite comme un processus de transformation des structures et de l'imaginaire qu'elles véhiculent, un acte de subversion s'opérant au cœur même de la langue, érigée au rang d'arme poétique.

2. La Black Consciousness idéologie et engagement

Cette partie du document explore l'idéologie et les objectifs du mouvement de la Black Consciousness. Le but principal est la reconnaissance de l'humanité noire par le monde blanc, en réaction à une déshumanisation systématique et institutionnalisée. Cette reconnaissance passe d'abord par la reconnaissance par les Noirs de leur propre humanité, un défi considérable compte tenu de l'intériorisation des notions de supériorité et d'infériorité raciales. Inspiré par les mouvements américains des droits civiques et Black Power, et par les œuvres de Frantz Fanon, le mouvement, mené par Steve Biko, rejette la simple potentialité ou l'idéalisation de la conscience noire, la définissant comme immanence. La poésie de la Black Consciousness est ainsi marquée par une affirmation totale et non négociable de l'engagement du sujet dans le monde, avec une dimension ontologique fondamentale liée à la construction du récit personnel et collectif. L'interlocution et la reconnaissance de l'autre comme sujet sont présentées comme des éléments essentiels. Le mouvement est aussi décrit comme une rupture radicale avec l'acceptation implicite de l'oppression et avec les méthodes de lutte antérieures. La Black Consciousness s'oppose à la vision color-blind, la considérant comme une forme d'ignorance des réalités de la soumission et de la déshérence raciale. L'engagement politique du mouvement englobe des questions politiques, économiques et sociales, et il envisage même l'action violente et la lutte armée.

3. Les conditions de production et l engagement radical des poètes

Cette section examine les conditions difficiles dans lesquelles la poésie de la Black Consciousness a émergé. La contrainte omniprésente – discrimination raciale, exploitation, oppression politique, censure, silence imposé – est détaillée. À ces contraintes objectives s'ajoutent des pressions moins visibles mais tout aussi importantes : autocensure, auto-limitation, exil intérieur, et la conscience de vivre dans un monde d'indicible et d'incommunicable. La prise de parole devient en soi un acte d'engagement politique radical et total, une exploration de ce que signifie exister dans un contexte d'oppression systématique. L'analyse montre que la poésie de la Black Consciousness est une pratique expérimentale qui, à partir de l'analyse de l'expérience vécue, crée de nouvelles structures épistémologiques. L'appropriation de la langue est présentée comme une tactique de combat, visant à transformer les techniques d'écriture en force performative. Le dialogue entre les textes, les poètes et leur public est essentiel dans ce processus de transformation de la langue en outil de reconquête et de construction d'un nouvel humanisme. L’objectif ultime est de dépasser la simple résistance à l'oppression pour construire une nouvelle vision du monde. Le travail sur la langue est primordial car il permet de renverser les structures existantes de l’oppression, tant au niveau idéologique que linguistique, pour permettre la persistance de l’échange et de la participation.

II.La langue comme champ de bataille appropriation et subversion

Une section majeure du document se penche sur la manière dont la langue, notamment l'anglais et l'afrikaans, est devenue un enjeu central de la lutte contre l'apartheid. Les poètes de la Conscience Noire ont non seulement utilisé l'anglais pour atteindre un public plus large (national et international), mais ils l'ont également déconstruit et réinventé pour exprimer une réalité sud-africaine différente. L'étude met l'accent sur les stratégies linguistiques utilisées pour contourner la censure, s'appropriant la langue de l'oppresseur et la transformant en instrument de subversion. Les émeutes de Soweto (1976), liées à l'imposition de l'afrikaans dans les écoles, sont citées comme un exemple de la tension linguistique.

III.L oralité et la performance poétique une action politique

Ce document souligne l'importance de l'oralité dans la poésie de la Conscience Noire. La performance poétique, souvent liée à des traditions orales, est présentée comme un acte politique en soi, un moyen direct d'interaction avec le public et de mobilisation collective. Le texte discute la manière dont la poésie, à travers l'oralité et la performance, a pu dépasser la simple représentation de la souffrance pour devenir un outil d'action et de conscientisation. Des exemples de poètes utilisant des techniques de performance et de dialogue sont mentionnés. L'analyse s'intéresse à la capacité de la poésie à construire une communauté et à créer un espace de parole face au silence imposé par l'apartheid.

IV.La poésie et le silence imposé par l apartheid

Le silence forcé sous l'apartheid est présenté comme une forme d'oppression qui a poussé les poètes à inventer de nouveaux langages et stratégies d'expression. La censure, la surveillance policière et les limites imposées par le régime ont contraint les artistes à élaborer des codes, des détours linguistiques et des formes poétiques innovantes pour contourner les restrictions et faire entendre leurs voix. Le document explore comment cette contrainte a conduit à une créativité et une force d'expression exceptionnelles.

V.Héritage et impact durable de la poésie de la Conscience Noire

La section finale souligne l'héritage durable de la poésie de la Conscience Noire dans l'Afrique du Sud post-apartheid. Malgré les critiques postérieures minimisant l'impact ou la valeur de ce mouvement, le document met en lumière la manière dont ces poètes ont construit un nouvel humanisme noir, ont lutté contre la déshumanisation imposée par le régime, et ont créé des outils critiques pour déconstruire les structures d'oppression. L'étude met en avant la persistance de la vigilance et du questionnement politique dans la littérature sud-africaine.

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