
Documents de la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Marrakech
Informations sur le document
Langue | French |
Format | |
Taille | 3.27 MB |
- Médecine
- Serment d'Hippocrate
- Université
Résumé
I.Épidémiologie de la Spondylodiscite Tuberculeuse au Maroc
La tuberculose vertébrale, ou mal de Pott, reste un problème de santé publique au Maroc, avec plus de 27 000 nouveaux cas de tuberculose chaque année. Notre étude rétrospective de 81 cas montre une prédominance chez l'adulte jeune (âge moyen 46,2 ans), probablement due à la vaccination BCG. La tuberculose ostéo-articulaire représente une proportion significative des cas de tuberculose extra-pulmonaire, avec 52% des localisations ostéo-articulaires touchant la colonne vertébrale au Maroc. Dans les pays industrialisés, on observe une recrudescence liée au vieillissement de la population et à l'immunodépression (SIDA).
1. Prévalence de la Tuberculose Vertébrale au Maroc et dans le Monde
L'étude souligne la persistance de la tuberculose vertébrale, ou spondylodiscite tuberculeuse, comme un problème majeur de santé publique au Maroc. Plus de 27 000 nouveaux cas de tuberculose sont signalés chaque année, soulignant l'ampleur de la problématique. L'étude met en évidence une prévalence importante de la tuberculose vertébrale au Maroc, représentant 52% des localisations ostéo-articulaires de la maladie, comparé à 22% en Tunisie et 49% en Algérie. Cette fréquence élevée de spondylodiscite tuberculeuse confirme l'importance de la maladie dans la région du Maghreb. Le document note également une distribution bimodale dans les pays en voie de développement, avec des pics de fréquence chez les enfants et les adultes. Cependant, l'étude se concentre sur la population marocaine, où l'âge moyen des patients atteints de tuberculose vertébrale est de 46,2 ans, suggérant un impact significatif sur la population adulte jeune. Cette tendance pourrait être liée à l'efficacité du programme de vaccination BCG, qui offre une protection contre la maladie durant l'enfance. En revanche, les pays industrialisés connaissent une recrudescence de la tuberculose, notamment en raison du vieillissement de la population et de l'augmentation des cas d'immunodépression, le SIDA étant un facteur majeur.
2. Facteurs de Risque et Populations Touchées
Le document explore les facteurs qui contribuent à la prévalence de la spondylodiscite tuberculeuse. Chez les adultes, l'infection touche initialement la plaque sous-chondrale antérieure de la vertèbre, progressant ensuite vers le disque intervertébral et les vertèbres adjacentes, avec une extension possible vers les parties molles. Différentes formes cliniques sont décrites: une forme diffuse superficielle caractérisée par des érosions et de petites cavernes somatiques, et une forme caverneuse localisée. La coexistence de facteurs favorisant ou d'un état d'immunodépression est mentionnée, avec une estimation allant de 6 à 17% des cas. Ces facteurs comprennent l'éthylisme chronique, le diabète, l'insuffisance rénale chronique, la cirrhose hépatique, les cancers, la chimiothérapie, la corticothérapie prolongée et l'infection à VIH. Cependant, l'étude note que le rôle favorisant du SIDA semble actuellement moins important que précédemment supposé. L'étude souligne également l'absence de protection vaccinale du BCG chez les personnes âgées, les rendant plus vulnérables à une réactivation de la tuberculose. Dans les pays industrialisés, deux populations sont particulièrement touchées: les personnes âgées, souvent avec un facteur favorisant, et les jeunes immigrants provenant de zones d'endémie tuberculeuse. Ces observations mettent en lumière la complexité des facteurs liés à l'épidémiologie de la spondylodiscite tuberculeuse.
II.Diagnostic Imagerie de la Tuberculose Vertébrale IRM et Scanner
Le diagnostic de spondylodiscite tuberculeuse repose sur l'imagerie médicale. La tomodensitométrie (TDM), ou scanner, permet de visualiser les lésions osseuses, les séquestres et les calcifications. L’IRM est supérieure pour le diagnostic précoce, la surveillance post-thérapeutique et les cas avec complications neurologiques. L'IRM et le scanner révèlent des signes caractéristiques tels que le pincement discal, les géodes osseuses, l’ostéolyse et les abcès paravertébraux, permettant un diagnostic plus précis que la radiographie standard, souvent négative au stade précoce.
1. Rôle de la Tomodensitométrie TDM ou Scanner dans le Diagnostic
Le document met en avant l'importance du scanner (TDM) dans le diagnostic de la spondylodiscite tuberculeuse. Il est décrit comme un examen performant permettant de détecter avec précision les lésions disco-somatiques, même à un stade précoce où la radiographie standard est souvent négative. Le scanner permet une évaluation précise de l'extension des lésions vers les tissus mous intra et périrachidiens. Il est particulièrement utile pour la visualisation des calcifications, des abcès paravertébraux et des séquestres osseux, des signes importants pour le diagnostic différentiel avec d'autres infections. L'analyse des images du scanner permet d'observer des signes caractéristiques tels que le pincement discal (souvent le signe le plus précoce), les géodes osseuses, l'ostéolyse, les tassements vertébraux et les séquestres osseux. La détection d'abcès paravertébraux par scanner est également un élément crucial dans le diagnostic. L’étude mentionne que dans leur série, le scanner a permis d’identifier 6 cas d'ostéophytose marginale adjacente au foyer pottique. La visualisation de l'épidurite par TDM est plus difficile que par IRM, bien que l’injection intraveineuse de produit de contraste puisse améliorer la visualisation et mettre en évidence un aspect typique en « embrase de rideaux ». En résumé, la TDM apporte des informations essentielles sur l'atteinte osseuse, discale et des parties molles, même dans les formes atypiques de la maladie.
2. Supériorité de l Imagerie par Résonance Magnétique IRM
L'IRM est présentée comme une technique supérieure au scanner pour certains aspects du diagnostic de la spondylodiscite tuberculeuse. Sa capacité à fournir des images multiplanaires (axial, sagittal, frontal) permet une analyse plus complète des lésions. L'IRM permet un diagnostic précoce de la maladie grâce à sa sensibilité supérieure pour la détection de l’inflammation et des lésions discales, se manifestant par un hypo ou iso signal en T1 et un hypersignal en T2. L'interruption de l'hyposignal de la corticale des plateaux vertébraux en T1 et T2 est également un signe important visible en IRM. L’IRM permet une meilleure évaluation des phénomènes inflammatoires au niveau des vertèbres adjacentes, montrant un allongement des temps de relaxation en T1 et T2. L’image classique des géodes en miroir est souvent visible en IRM, même avant d'être détectable radiologiquement. De plus, l'IRM est clairement supérieure au scanner pour l’analyse des spondylodiscites avec complications neurologiques, permettant une meilleure visualisation de l’épidurite et de son extension. L'injection intraveineuse de gadolinium améliore la visualisation de l'épidurite en IRM, montrant un rehaussement homogène (stade phlegmoneux) ou hétérogène (stade d'abcès) de la lésion. L'étude souligne aussi la capacité de l'IRM à mieux visualiser l'atteinte des parties molles, notamment les collections pré-vertébrales et leur extension, même si elle ne permet pas de visualiser les calcifications, contrairement à la TDM.
3. Limites de la Radiologie Standard et Intérêt de l Imagerie en Coupe
Le texte souligne les limitations de la radiographie standard dans le diagnostic de la spondylodiscite tuberculeuse. Bien qu'étant un examen facile et peu coûteux, elle n'est positive qu'à un stade avancé de la maladie, expliquant la nécessité de recourir à des techniques plus performantes comme l'IRM et le scanner pour un diagnostic précoce et un meilleur bilan lésionnel. Au stade typique, la radiographie peut montrer une destruction vertébrale, un pincement discal et parfois des images d'abcès, mais ces signes sont souvent absents au début de la maladie. L'imagerie en coupe, par TDM ou IRM, est donc capitale pour le diagnostic, en particulier des formes atypiques, offrant une évaluation précise des lésions osseuses, discales et des parties molles, améliorant significativement le diagnostic précoce et la prise en charge thérapeutique. L'étude mentionne que dans leur série, 50 patients ont bénéficié d'une TDM et 31 d'une IRM, soulignant l'utilisation fréquente de ces techniques d'imagerie dans leur pratique clinique.
III.Formes Cliniques et Radiologiques de la Tuberculose Vertébrale
L'atteinte vertébrale peut prendre différentes formes: ostéite centro-somatique (lésions dans le corps vertébral), atteintes de l'arc postérieur (plus rares), et formes multifocales. L'aspect radiologique varie selon le stade évolutif, allant d'érosions superficielles à des tassements vertébraux importants, pouvant engendrer des déformations rachidiennes (cyphoses). La présence d'abcès froids est fréquente, parfois avec extension vers les parties molles et complications neurologiques (compression médullaire, radiculalgies).
1. Ostéite Vertébrale Centro somatique
Cette forme, observée chez quatre patients dans l'étude (trois avec TDM, un avec IRM), se caractérise par une atteinte du corps vertébral. Trois cas étaient localisés au rachis lombaire, un au rachis dorsal. Les manifestations radiologiques variaient: ostéocondensation pure dans un cas, géodes intra-somatiques dans deux cas, et un tassement vertébral en galette dans le dernier. Un point important est que tous les patients présentaient des collections dans les parties molles voisines. Cette observation souligne la nécessité d'une exploration complète incluant les tissus mous environnants lors de l'examen d'imagerie, car l'atteinte des parties molles est systématique dans cette forme. L'analyse des résultats obtenus par TDM et IRM permet de comprendre la variété des présentations radiologiques de cette forme particulière de tuberculose vertébrale, en soulignant l'importance de la corrélation clinico-radiologique pour un diagnostic précis.
2. Atteinte de l Arc Vertébral Postérieur
L'atteinte de l'arc vertébral postérieur est décrite comme une forme rare de tuberculose vertébrale, avec une prévalence estimée entre 2 et 10% des cas. Elle survient le plus souvent par extension d'une lésion initialement disco-somatique ou par contiguïté à un abcès tuberculeux. L'atteinte isolée de l'arc postérieur est plus exceptionnelle. Le diagnostic nécessite une imagerie en coupe, TDM ou IRM, pour un bilan lésionnel précis. La TDM est plus performante pour visualiser les anomalies osseuses. L’IRM est incontournable en cas de troubles neurologiques, l'injection de gadolinium étant indispensable pour la recherche d'abcès et l'étude de la compression nerveuse. Les lésions sont généralement ostéolytiques, et l'extension intra-canalaire rapide peut causer des manifestations neurologiques graves. Dans cette étude, un abcès était présent dans les quatre cas d'atteinte de l'arc vertébral postérieur.
3. Formes Atypiques et Multifocales
Le document évoque la présence de formes atypiques et multifocales de tuberculose vertébrale, qui posent des défis diagnostiques. Une forme multifocale, ou spondylodiscite multi-étagée, est décrite comme un syndrome rachidien multi-étagé, avec radiculalgies multiples, douleurs à la pression des apophyses épineuses et contractures para-vertébrales. Cette forme affecte plus fréquemment les personnes avec des antécédents de tuberculose ou un foyer bacillaire actif, et semble plus courante chez les enfants, les noirs africains et les individus immunodéprimés. La recherche d’autres localisations extra-vertébrales est recommandée. Les abcès froids associés à ces formes atypiques peuvent être volumineux et fistulisés, à l’opposé des séquestres ossifluants observés dans le mal de Pott typique. La difficulté diagnostique liée à ces formes justifie le recours à des techniques d'imagerie sophistiquées comme la TDM et l'IRM, potentiellement avec guidage pour une biopsie.
IV.Diagnostic Différentiel et Traitement de la Spondylodiscite
Le diagnostic différentiel inclut les spondylodiscites infectieuses non tuberculeuses (à pyogènes, brucellose), l'hydatidose vertébrale et les lésions néoplasiques. Le traitement de la spondylodiscite tuberculeuse repose principalement sur la chimiothérapie antituberculeuse, associant plusieurs anti-bacillaires (Streptomycine, Isoniazide, Rifampicine, Pyrazinamide). La chirurgie peut être nécessaire dans certains cas, notamment pour les atteintes cervicales et dorsales. L'imagerie médicale (TDM, IRM) joue un rôle crucial dans le suivi de la réponse thérapeutique.
1. Diagnostic Différentiel de la Spondylodiscite
Le diagnostic différentiel de la spondylodiscite est crucial car plusieurs affections peuvent présenter des signes cliniques et radiologiques similaires. Le document mentionne les spondylodiscites à pyogènes, principalement dues au staphylocoque doré, caractérisées par une symptomatologie clinique bruyante, un syndrome inflammatoire biologique marqué, une hyperleucocytose et des hémocultures positives. L'imagerie montre une lésion agressive, ostéolytique, avec une ostéosclérose périphérique en phase chronique. Les géodes, les séquestres et les abcès sont rares. La brucellose est une autre cause de spondylodiscite, se traduisant souvent par une sacro-iléite ou une coxite associée, et un processus ostéoblastique intense. Un cas d’épidurite lombaire révélatrice d'une spondylodiscite mélitococcique est rapporté, diagnostiqué au scanner, mais avec une étude anatomopathologique et bactériologique du granulome épidural négative. Le diagnostic a été confirmé par le test sérologique de Wright. Les spondylodiscites rhumatismales présentent un hyposignal du disque et des vertèbres adjacentes à l'IRM en T1 et T2. Enfin, l'hydatidose vertébrale, fréquente dans les pays d'endémie hydatique, se caractérise par une image multi-lacunaire du corps vertébral et de l'arc postérieur, avec atteinte costale fréquente, un disque longtemps préservé, et des tassements tardifs. Ces descriptions aident à distinguer la tuberculose vertébrale de ces autres pathologies.
2. Traitement de la Spondylodiscite Tuberculeuse
Le traitement de la spondylodiscite tuberculeuse repose principalement sur la chimiothérapie antituberculeuse. Autrefois, la biopsie chirurgicale était essentielle pour la confirmation diagnostique avant d’instaurer un traitement médical prolongé. Aujourd’hui, l’imagerie moderne, notamment le guidage par scanner pour les ponctions-biopsies, et des critères radiologiques de forte présomption, permettent une instauration plus rapide de la chimiothérapie. Un traitement d’épreuve peut être tenté et l’imagerie permet de l’évaluer. Le régime actuel, classé en catégorie I par le programme national de lutte antituberculeuse au Maroc, comprend une phase d'attaque de deux mois avec quatre anti-bacillaires (Streptomycine, Isoniaside, Rifampicine, Pyrazinamide) pris six jours sur sept, suivie d'une phase de continuation de sept mois avec deux anti-bacillaires (Rifampicine et Isoniazide), également pris six jours sur sept. L'étude n'a pas pratiqué de ponction-biopsie disco-vertébrale dans sa série en raison de contraintes techniques. La chirurgie peut être nécessaire, surtout pour les localisations cervicales et dorsales, moins fréquemment pour les localisations lombaires.