Le Perfectionnisme chez les Étudiants Universitaires

Le Perfectionnisme chez les Étudiants Universitaires

Informations sur le document

Langue French
Format | PDF
Taille 1.10 MB
  • Perfectionnisme
  • Dépression
  • Étudiants universitaires

Résumé

I.Définition et Types de Perfectionnisme

Le document définit le perfectionnisme comme la recherche excessive de la perfection, impliquant des standards de performance très élevés et une forte autocritique (1). Il distingue le perfectionnisme adapté, caractérisé par des attentes réalistes et une satisfaction personnelle, du perfectionnisme inadapté, lié à des buts inatteignables et un manque constant de satisfaction (Résumé). Différentes formes existent, notamment le perfectionnisme orienté vers soi et le perfectionnisme orienté vers les autres (3), ayant des conséquences distinctes sur la santé mentale.

1. Définition du Perfectionnisme

Le document aborde la définition du perfectionnisme sous plusieurs angles. Une première définition, issue du champ de la psychologie (1), le décrit comme la poursuite de standards de performance ou d'objectifs personnels très élevés, associée à une forte autocritique. Il est important de noter que le simple fait d'avoir des normes élevées ne définit pas à lui seul le perfectionnisme (3). Une personne peut viser l'excellence sans pour autant ressentir le stress et la détresse souvent liés au perfectionnisme inadapté. D'autres auteurs (Boivin, Marchand et collaborateurs, 1996) considèrent le perfectionnisme comme une structure cognitive profonde qui peut se manifester de manière positive (motivation, énergie) ou négative (anxiété, dépression, surmenage) (4). En psychiatrie (2), le perfectionnisme a été intégré comme critère diagnostique du trouble de la personnalité obsessionnelle compulsive dans la CIM-9 et les versions ultérieures (CIM-10, DSM-III, DSM-III-R, DSM-IV, DSM-IV-R), se manifestant notamment par l'incapacité à terminer un projet en raison d'exigences personnelles trop strictes. Des psychologues canadiens (Hewitt et collaborateurs, 1996) décrivent le perfectionnisme comme le besoin d'être, ou de paraître, parfait, caractérisé par la persévérance, la minutie et le maintien de normes irréalistes, avec une tendance à se juger soi-même et les autres comme étant en échec par rapport à ces normes (3). La notion de perfectionnisme est complexe et ne se limite pas à une simple recherche d'excellence.

2. Perfectionnisme Adapté vs. Inadapté

Le document souligne une distinction cruciale entre le perfectionnisme adapté et inadapté. Si le perfectionnisme inadapté se caractérise par des exigences extrêmement élevées envers soi-même, la conviction de ne pas pouvoir se permettre d'erreur, et une exagération de l'importance des tâches, menant à une incapacité à atteindre l'objectif malgré les efforts fournis (4), le perfectionnisme adapté se différencie par des attentes raisonnables, produisant un sentiment de satisfaction. Le texte met en exergue les caractéristiques du perfectionnisme adapté : une bonne actualisation de soi, une augmentation de l'estime de soi et de la confiance, une capacité à prendre des décisions, une analyse systématique des situations, la précision des objectifs et un investissement important dans le travail. (5-2 et 5). Il faut noter que la simple recherche d’excellence ne correspond pas nécessairement au perfectionnisme inadapté. Ce dernier correspond à la poursuite de buts inatteignables, sources de stress et d’insatisfaction permanents. L’individu perfectionniste, dans sa quête d’éloges et d’évitement de critiques, peut nuire à ses relations personnelles et professionnelles et vivre dans une tension constante (Résumé). Le passage d’un perfectionnisme adapté à un perfectionnisme inadapté est possible, mettant en relief la nécessité d'une approche équilibrée et consciente de ses propres attentes.

3. Formes du Perfectionnisme

Le texte distingue deux orientations principales du perfectionnisme : le perfectionnisme orienté vers les autres et le perfectionnisme orienté vers soi (3). Le perfectionnisme orienté vers les autres se manifeste par l'exigence de perfection envers autrui, visant un univers sans défaut et jugeant les autres sur leurs performances. Cette forme peut être particulièrement néfaste pour les relations intimes, comme le souligne Hewitt : « Si vous exigez la perfection de votre conjoint(e) et que vous critiquez, vous pouvez être assuré(e) qu’il va y avoir des problèmes relationnels » (3). En revanche, le perfectionnisme orienté vers soi implique des exigences élevées envers soi-même, la fixation d'objectifs impossibles à atteindre et un sentiment constant d'échec. Des recherches ont établi une corrélation entre cette forme de perfectionnisme et des problèmes de santé mentale, tels que l’anorexie, les troubles du sommeil et les troubles anxieux (3). La compréhension de ces différentes orientations est essentielle pour une intervention thérapeutique ciblée, car les mécanismes et les conséquences varient selon l'orientation du perfectionnisme. Il est crucial de reconnaitre que ces différentes formes de perfectionnisme peuvent coexister chez un même individu, complexifiant davantage le tableau clinique et nécessitant une approche thérapeutique individualisée.

II.Perfectionnisme et Troubles Psychologiques

Le perfectionnisme inadapté est fortement lié à plusieurs troubles psychologiques. Des études mentionnent son association avec la dépression, l’anxiété, les troubles anxieux généralisés, la phobie sociale, les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) et les troubles alimentaires (4, 13, 14, 15, 16, 17, 19, 22, 24). Certaines recherches soulignent le rôle du doute sur les actions et la recherche excessive de contrôle (4) comme facteurs contributifs. Le perfectionnisme peut également être un facteur de risque pour le comportement suicidaire (32).

1. Perfectionnisme et Dépression

Le lien entre le perfectionnisme et la dépression est un thème récurrent dans le document. Plusieurs études sont citées pour appuyer cette association. Une étude canadienne (Enns MW et al., 1998) sur 145 patients en consultation externe a évalué le perfectionnisme à l'aide d'une échelle multidimensionnelle et la dépression avec les échelles de Beck et Hamilton. Une autre étude canadienne (Clara IP et al., 2007) portant sur 365 patients dépressifs a montré une relation étroite entre la dépression et l'autocritique, une dimension clé du perfectionnisme (15). Une étude américaine (Saddler CD et al., 1993) sur 150 étudiants universitaires a mis en évidence un lien fort entre le perfectionnisme, la procrastination académique et la dépression (16). Le perfectionnisme socialement prescrit a également été associé de manière significative à la dépression (14). Des données empiriques indiquent que le perfectionnisme inadapté entrave le succès des traitements contre la dépression (17), les patients ayant du mal à développer une solide alliance thérapeutique et ressentant un sentiment d'échec (18). Ces études convergent vers la conclusion d'une forte corrélation entre le perfectionnisme, particulièrement ses aspects inadaptifs, et la dépression, soulignant l'importance de considérer le perfectionnisme comme un facteur de risque ou un élément aggravant dans la dépression.

2. Perfectionnisme et Troubles Obsessionnels Compulsifs TOC

Le document explore le lien entre le perfectionnisme et les troubles obsessionnels compulsifs (TOC). Le perfectionnisme est souvent associé au TOC, en raison du caractère compulsif des comportements observés chez les individus atteints. Dans la symptomatologie du TOC, l'individu entretient souvent un idéal de perfection concernant son environnement, sa vie professionnelle ou morale. Hollander (1965) a fait la distinction entre le perfectionnisme (croyance que tout doit être parfait) et la compulsivité (stratégie comportementale pour atteindre un idéal de perfection) (4). Les croyances perfectionnistes ne sont pas à l'origine de tous les symptômes TOC, mais jouent un rôle important dans l'étiologie et le maintien de certaines manifestations. La répétition des actes compulsifs, visant à atteindre un idéal de perfection, empêche l'individu de prendre conscience que la catastrophe anticipée ne se produirait pas même en présence d'imperfections (4). Une étude italienne (Sassaroli S et al.) a montré que chez les sujets atteints de TOC, la dimension la plus manifeste du perfectionnisme est le doute sur les actions (19). Pitman (1987) a quant à lui associé les actes perfectionnistes à un besoin excessif de contrôle sur l'environnement (4).

3. Perfectionnisme et Autres Troubles Anxiété Phobie Sociale Troubles Alimentaires et Comportement Suicidaire

Le perfectionnisme est lié à divers autres troubles psychologiques au-delà de la dépression et des TOC. Le texte mentionne une association avec l'anxiété généralisée, le perfectionnisme étant une caractéristique cognitive fréquente chez les personnes atteintes (4). L'anxiété de performance, vue comme un trait de personnalité, est également abordée. Pour les individus craignant que leurs imperfections soient inacceptables, l'anxiété sociale peut être importante (4). Des études soulignent que les personnes souffrant d'anxiété sociale ont le sentiment de devoir performer au-delà de leurs capacités pour être acceptées (21). Une étude canadienne (Antoney M et al., 1998) a montré que les sujets phobiques sociaux présentaient des scores élevés de perfectionnisme, notamment concernant le souci de l'erreur, le doute sur les actions et les critiques parentales (22). Une relation entre le perfectionnisme et les troubles alimentaires est aussi évoquée, une étude espagnole (Castro-Forneils J, 2007) indiquant que le perfectionnisme orienté vers soi est un facteur prédictif de troubles alimentaires (24). Enfin, le document souligne le lien potentiel entre le perfectionnisme et le comportement suicidaire. Des études mettent en avant l'échec à atteindre des standards irréalistes comme un facteur majeur dans l'initiation de comportements suicidaires chez les adolescents (32).

III.Facteurs Etiologiques du Perfectionnisme

Plusieurs facteurs contribuent au développement du perfectionnisme. Des facteurs environnementaux, comme des parents perfectionnistes ou un renforcement positif inconsistent (11), ainsi que des facteurs culturels, incluant les médias, les pressions sociales et académiques, sont impliqués (11). La théorie cognitive souligne le rôle des schémas cognitifs maladaptés et des croyances irréalistes (4), tandis que la psychanalyse met l’accent sur la « tyrannie du devoir » (4). L’étude d’Adler sur le sentiment d’infériorité comme facteur de compensation est aussi mentionnée (11).

1. Perspective Cognitive et Psychanalytique

Le document explore les facteurs étiologiques du perfectionnisme à travers différentes perspectives théoriques. La théorie cognitive, notamment les travaux de Beck, Young et collaborateurs (1979, 1985, 1994), décrit le perfectionnisme comme un schéma cognitif de base, une structure cognitive profonde qui se développe tôt dans la vie en fonction des expériences vécues et qui influence la façon dont l'individu traite l'information (4). Des schémas cognitifs maladaptés et irréalistes peuvent conduire à des distorsions de l'information, des pensées négatives et des difficultés psychologiques comme l'anxiété et la dépression. La théorie psychanalytique relie le perfectionnisme au développement et au maintien des névroses. Karen Horney (1950) a conceptualisé la « tyranny of shoulds » (tyrannie du devoir) comme une caractéristique du perfectionnisme pathologique, traduisant une tendance à ressentir des obligations excessives et un sentiment permanent d'insuffisance, même si les efforts déployés sont importants (4). La croyance que tout doit être parfait est également soulignée par des auteurs cognitivistes comme Ellis, Beck et Young (4). La théorie rationnelle-émotive d'Ellis (1962) considère le perfectionnisme comme une croyance erronée conduisant à une mauvaise interprétation de l'environnement, à des pensées et émotions négatives et à un comportement autodestructeur (4).

2. Facteurs Environnementaux et Culturels

Au-delà des perspectives théoriques, le document identifie des facteurs environnementaux et culturels contribuant au développement du perfectionnisme. L'influence du milieu familial est soulignée, avec notamment l'impact d'un renforcement positif peu fréquent ou incohérent de la part des parents (11). Un modèle parental perfectionniste peut aussi jouer un rôle important dans le développement du perfectionnisme chez l'enfant (11). Sur le plan culturel (11), les croyances perfectionnistes peuvent être exacerbées par les médias, les croyances morales et religieuses, le contexte économique, académique et professionnel, les conflits familiaux et les pressions des pairs. Adler a suggéré qu'un enfant ayant un sentiment d'infériorité, notamment face à des brimades de ses pairs, pourrait chercher à compenser ce sentiment en visant la perfection dans ses études ou son travail. Cette tendance, selon Adler, pourrait persister jusqu'à l'âge adulte, menant à des problèmes d'anxiété, de dépression, de surmenage et de difficultés interpersonnelles (11). Ces différents aspects soulignent l’interaction complexe entre les facteurs individuels et environnementaux dans la genèse du perfectionnisme.

IV.Perfectionnisme chez les Étudiants

Une étude a été menée auprès de 250 étudiants marocains : 170 à la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Marrakech et 80 à l’École Supérieure de Commerce (Sup de Co). L'étude visait à évaluer la prévalence et l'intensité du perfectionnisme chez ces étudiants, à identifier leur profil et à explorer les conséquences négatives, y compris la dépression associée. Les résultats ont révélé que 62.4% des étudiants présentaient un perfectionnisme, dont 10.8% à forte intensité et 51.6% à intensité modérée; 28% étaient dépressifs. Le perfectionnisme augmentait avec l'âge.

1. Étude sur le Perfectionnisme Étudiant

L'étude porte sur la prévalence et l'intensité du perfectionnisme chez les étudiants, un sujet jusqu'alors peu exploré. Elle a été menée auprès de 250 étudiants de deux établissements marocains prestigieux : la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Marrakech (170 étudiants) et l'École Supérieure de Commerce (Sup de Co) de Marrakech (80 étudiants), l'accès à ces institutions étant basé sur des concours sélectifs. L'objectif principal était d'étudier le comportement perfectionniste, d'évaluer sa prévalence et son intensité chez ces étudiants, de déterminer le profil des étudiants perfectionnistes, de détecter les conséquences négatives du perfectionnisme et d'identifier une possible association avec la dépression. L'étude visait également à proposer des réflexions pour aider les étudiants à prévenir le développement d'un perfectionnisme inadapté. Le contexte universitaire, qui encourage l'excellence et le dépassement de soi, crée un terrain fertile pour le développement d'attentes irréalistes et, par conséquent, de symptômes d'anxiété et de dépression. Le perfectionnisme, dans ce contexte, est perçu non pas comme une recherche d'excellence, mais comme la poursuite de l'inatteignable, source de souffrance. Les résultats de l'étude sont attendus avec intérêt pour une meilleure compréhension de la réalité des étudiants dans ces milieux exigeants.

2. Résultats de l Étude et Conséquences

L'étude, menée auprès de 250 étudiants (170 en médecine, 80 en commerce), a révélé une prévalence importante du perfectionnisme. Précisément, 62.4% des étudiants étaient perfectionnistes, dont 10.8% à haute intensité et 51.6% à intensité modérée. De plus, 28% des étudiants présentaient une dépression. Une corrélation positive a été observée entre le niveau de perfectionnisme et l'âge des étudiants. Ces résultats mettent en lumière les conséquences négatives du perfectionnisme chez les étudiants, notamment l'impact sur leur santé mentale. Les efforts considérables fournis par les étudiants perfectionnistes ne leur permettent pas toujours d'atteindre leurs objectifs irréalistes, entraînant des tensions, de l'insatisfaction, et nuisant à leurs relations personnelles et professionnelles. Il est important de souligner que le perfectionnisme n'est pas une fatalité et que des changements sont possibles. L'étude souligne la nécessité d'une intervention précoce pour prévenir l'évolution vers un perfectionnisme inadapté et ses conséquences délétères.

V.Traitement du Perfectionnisme

L’approche thérapeutique cognitivo-comportementale est privilégiée pour traiter le perfectionnisme pathologique (4, 2). L'intervention vise à identifier et à modifier les distorsions cognitives et les schémas perfectionnistes inadaptés. Des stratégies cognitives et comportementales spécifiques sont utilisées pour modifier les croyances perfectionnistes (4).

1. Approche Thérapeutique Privilégiée

Le document met en avant l'approche psychothérapeutique d'orientation cognitivo-comportementale comme méthode privilégiée pour le traitement du perfectionnisme pathologique (4, 2). Cette approche vise à identifier et à confronter les distorsions cognitives sous-jacentes au comportement perfectionniste. L'intervention consiste à démystifier le système de valeurs du sujet perfectionniste pathologique en le comparant à celui d'un perfectionnisme dit normal ou adapté. Il s’agit d'une démarche qui permet de réévaluer les croyances et les schémas de pensées à l'origine du perfectionnisme afin de les adapter à une réalité plus réaliste et moins exigeante. La thérapie cognitivo-comportementale offre une panoplie d’outils pour atteindre cet objectif, permettant de travailler sur les pensées automatiques négatives et les schémas perfectionnistes inadaptés pour les modifier progressivement et durablement. Elle se base sur une conceptualisation précise du problème pour ensuite mettre en place une intervention personnalisée, combinant des techniques cognitives et un programme de rééducation comportementale. Cette approche est particulièrement pertinente pour aider les individus à gérer les conséquences négatives du perfectionnisme inadapté sur leur vie.

2. Stratégies Cognitivo Comportementales

Le texte mentionne implicitement l'utilisation de stratégies cognitives et comportementales pour modifier les croyances perfectionnistes (4). Bien que les techniques spécifiques ne soient pas détaillées, on peut inférer que l'approche se concentre sur la modification des pensées automatiques négatives, la remise en question des schémas perfectionnistes, et l'apprentissage de nouvelles stratégies comportementales plus saines. Des exemples de stratégies comportementales pourraient inclure l'établissement de priorités pour mieux gérer les tâches, la valorisation de l'effort plutôt que du résultat parfait, la reconnaissance des symptômes d'un perfectionnisme inadapté (insatisfaction, abattement, anxiété, épuisement, stress) et l'attention portée au plaisir ressenti dans la poursuite d'un objectif, au-delà de la simple réussite. (7-2). L'objectif est de permettre à l'individu de développer une meilleure gestion de son temps et de ses efforts, de réduire le niveau d'exigence irréaliste et de développer une plus grande acceptation de soi et des imperfections. Le processus thérapeutique vise à cultiver une perception plus réaliste de soi et de ses capacités.