Engagement et Structure de la Faculté de Médecine

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Informations sur le document

École

Université Cadi Ayyad, Faculté de Médecine et de Pharmacie Marrakech

Spécialité Médecine
Type de document Serment Hippocratique et informations institutionnelles
Lieu Marrakech
Langue French
Format | PDF
Taille 1.09 MB
  • Médecine
  • Serment d'Hippocrate
  • Université Cadi Ayyad

Résumé

I. Perceptions de l épilepsie au Maroc Croyances et Attitudes Traditionnelles

Cette étude explore les perceptions et les attitudes envers l'épilepsie au Maroc, un pays à forte culture orale et religieuse musulmane. Elle se concentre sur les croyances des proches de patients épileptiques concernant l'étiologie et le traitement de la maladie. L'étude, menée auprès de 100 adultes (moyenne d'âge 40 ans et 5 mois, 66,6% de femmes, 76% urbains, 41% analphabètes), révèle que la moitié des répondants associent l'épilepsie à des causes surnaturelles (possession, malédiction, mauvais œil), démontrant la persistance de croyances traditionnelles. 75% ont eu recours au maraboutage. Seulement 5% connaissent les gestes appropriés de premiers secours, soulignant un besoin crucial d'éducation et de sensibilisation concernant l'épilepsie.

1. Contexte socioculturel marocain et perception de l épilepsie

L'étude s'intéresse à la perception de l'épilepsie au sein du contexte socioculturel marocain, caractérisé par une forte influence religieuse musulmane et une culture orale prédominante. Le système de santé étant insuffisant et l'analphabétisme répandu, les connaissances sur l'épilepsie sont limitées. Cette étude vise à comprendre comment cette maladie est perçue par les proches des patients dans un tel environnement, où la pauvreté et les inégalités sociales sont significatives, comme le souligne le rapport du cinquantenaire "50 ans de développement humain et perspectives 2025". L'étude met en lumière l'impact du manque d'information sur le soutien apporté aux malades par leur entourage familial, renforçant la nécessité d'une meilleure sensibilisation et éducation. Historiquement, l'épilepsie a été associée à des forces surnaturelles, comme le montrent les appellations passées telles que "morbus sacer", "morbus maior", ou encore "la baguette du Christ", illustrant une vision spirituelle et non médicale de la maladie.

2. Méthodologie de l étude et profil des participants

L'enquête a été menée auprès de cent adultes marocains (hommes et femmes) ayant accompagné leurs proches épileptiques à une consultation neurologique entre octobre 2003 et octobre 2004. Les participants ont été interviewés individuellement en arabe dialectal à l'aide d'un questionnaire de 18 items, préalablement validé par le laboratoire de biostatistiques de la faculté de médecine et de pharmacie de Marrakech. Le profil des participants révèle une moyenne d'âge de 40 ans et 5 mois, avec une prédominance féminine (66,6%). La moitié des répondants sont d'origine rurale, tandis que 76% résident en zone urbaine. Un taux important d'illettrés est constaté (41%), et les trois quarts des participants se situent dans une catégorie socio-économique basse. Cette diversité sociodémographique est cruciale pour analyser les différentes perceptions de l'épilepsie au sein de la population marocaine. L'étude ambitionne d'explorer la perception de l'épilepsie non seulement chez les proches des patients, mais aussi d'extrapoler à une vision plus large de la population marocaine.

3. Croyances traditionnelles et causes surnaturelles de l épilepsie

Les résultats de l'enquête révèlent une forte croyance en des causes surnaturelles pour expliquer l'épilepsie. Plus de la moitié des participants (53%) considèrent que la maladie est liée à l'ensorcellement, à la possession (souvent par des djinn), ou au mauvais œil. Cette croyance est influencée par le contexte culturel et religieux marocain, où les forces surnaturelles ont une place importante dans l'explication des maladies. Cette perception de l'épilepsie comme une maladie liée à des forces paranormales est partagée dans d'autres études internationales menées dans des pays en développement, confirmant ainsi la persistance de ces croyances traditionnelles. Le fait que 65% des répondants connaissent le terme arabe pour épilepsie (sar'â), dont 53% par le biais de leur entourage, souligne le rôle crucial des réseaux sociaux et familiaux dans la transmission de ces informations, souvent imprécises ou erronées. L’étude souligne l’importance des connaissances acquises par le biais de sources non médicales.

4. Gravité perçue et recours au maraboutage

Une proportion importante des participants (37%) considèrent l'épilepsie comme une maladie très grave, ce qui explique en partie le recours massif au maraboutage. En effet, 75% des répondants affirment avoir eu recours à des traitements traditionnels, notamment le maraboutage. Ce chiffre témoigne de la faible confiance dans la médecine moderne et de la persistance des pratiques traditionnelles, souvent en lieu et place des soins médicaux appropriés. L’étude met en évidence la relation entre la perception de la gravité de la maladie et le choix de recours aux pratiques traditionnelles, et le fort impact du manque d’information sur les prises de décisions thérapeutiques. Le recours au maraboutage se fait parfois avant même la consultation médicale, ce qui peut retarder le diagnostic et le traitement approprié. Le cas du sanctuaire de "Bouya Omar" à Kelâat Sraghna est cité en exemple pour illustrer les pratiques parfois dangereuses du maraboutage.

II.Traitements Traditionnels et Pratiques Inadéquates

Face à une crise d'épilepsie, de nombreuses pratiques traditionnelles sont utilisées au lieu des soins médicaux appropriés. La moitié des participants ont eu recours à des pratiques spirituelles ou religieuses (récitation du Coran), tandis que d’autres ont utilisé des méthodes inefficaces et potentiellement dangereuses (objets dans la bouche, eau, etc.). Le recours au maraboutage est significatif (75%), souvent avant même une consultation médicale. L’étude met en évidence l'impact des croyances traditionnelles sur la prise en charge de l'épilepsie et souligne l’importance de l’éducation thérapeutique.

1. Pratiques traditionnelles face aux crises d épilepsie

L'étude révèle un recours important à des pratiques traditionnelles et religieuses face aux crises d'épilepsie, reflétant un manque de connaissances sur les premiers secours médicaux. Près de la moitié des personnes interrogées déclarent ne rien faire et attendre la fin de la crise. Environ un tiers ont recours à la lecture du Coran, tandis que 16% combinent la récitation de versets coraniques avec d'autres méthodes, comme faire résonner des clés près de la tête du malade ou le couvrir d'un drap noir. D'autres pratiques sont mentionnées, comme brûler de l'encens ou faire sentir du goudron au patient. Seulement 5% des participants connaissent la position latérale de sécurité (PLS) ou l'administration de Valium intra-rectal (VIR), démontrant un manque crucial de connaissance des gestes appropriés pour gérer une crise d'épilepsie. Ces données mettent en lumière la nécessité d'une intervention éducative pour améliorer les connaissances et les pratiques face à une crise d'épilepsie.

2. Méthodes traditionnelles inappropriées et potentiellement dangereuses

De nombreuses pratiques traditionnelles mises en évidence par l’étude sont non seulement inefficaces, mais aussi potentiellement dangereuses. Introduire des objets dans la bouche du patient en crise, même des objets tranchants, pour éviter la morsure de la langue, est une pratique courante. D’autres actions nocives sont également rapportées: maîtriser le sujet par terre, lui attacher les membres, lui verser de l'eau dessus, le gifler ou le mettre sur le dos. Ces pratiques, parfois associées à des visites médicales, retardent la prise en charge médicale appropriée. Deux études, une à Casablanca en 1999 et l'autre à Marrakech en 2003, ont montré que le recours au maraboutage avait lieu avant la consultation médicale dans respectivement 66% et 74% des cas. Ce retard dans la prise en charge médicale a des conséquences néfastes pour la santé du patient. L’étude souligne l'importance de sensibiliser la population aux dangers de ces pratiques.

3. Le maraboutage et autres pratiques traditionnelles au Maroc et ailleurs

Le recours au maraboutage est une pratique très répandue au Maroc, souvent précédant toute consultation médicale. Le sanctuaire de "Bouya Omar" à Kelâat Sraghna illustre l'ampleur de ces pratiques, où les patients subissent des maltraitances. La "Hadra", une transe collective pratiquée dans certaines confréries religieuses marocaines, est également utilisée pour exorciser l’épileptique considéré comme possédé. Des pratiques similaires existent dans d'autres régions du monde. En Asie du Sud, la moitié des participants à une étude anglaise ont eu recours à des thérapies traditionnelles, incluant des consultations chez des pirs (musulmans) ou des gourous (hindous et sikhs), ainsi que l’utilisation de plantes. Au Pakistan, un tiers de la population privilégie les traitements religieux et spirituels. En Chine, la médecine traditionnelle chinoise (MTC) et des guérisseurs traditionnels sont consultés, souvent pour contrer l’ensorcellement. En Afrique, le recours à des guérisseurs est courant, visant à identifier un ancêtre offensé ou un tabou brisé. Des pratiques extrêmement douloureuses et préjudiciables sont même pratiquées dans certains pays d'Afrique de l'Ouest. L’étude souligne la persistance de ces pratiques malgré l’accès à la médecine moderne, et la nécessité d’intégrer les tradipraticiens dans un système de soins plus complet.

4. Combinaison de médecine moderne et traditionnelle limites et perspectives

Bien que la médecine traditionnelle ne puisse guérir l’épilepsie, elle apporte parfois un confort psychologique. Au Burkina Faso, la combinaison entre médecine moderne et traditionnelle est même privilégiée. Une étude au Sénégal a montré qu’une formation des guérisseurs traditionnels à la faculté de médecine améliore leur capacité à orienter les patients vers des neurologues et même à prescrire certains médicaments. Néanmoins, les familles ont généralement recours à la médecine moderne en dernier recours, après avoir épuisé les traitements traditionnels. Cette situation souligne à la fois les limites de l'accès aux soins dans certaines zones et la persistance de croyances profondes. L’étude met en avant le besoin de collaboration entre la médecine moderne et traditionnelle, notamment pour améliorer l’éducation thérapeutique et la prise en charge psychologique des patients.

III.Comparaison avec les Pratiques Internationales

L'étude compare les résultats marocains à des études internationales sur les perceptions de l'épilepsie. Dans plusieurs pays en voie de développement, une forte croyance en des causes surnaturelles persiste (djinn, possession, malédiction). Des pratiques traditionnelles, souvent nocives, sont signalées dans divers pays (Asie, Afrique, Amérique latine). L'étude souligne le caractère universel de la stigmatisation de l'épilepsie et la nécessité de programmes d'information et d'éducation pour améliorer la prise en charge de cette maladie neurologique.

1. Croyances sur les causes surnaturelles de l épilepsie une comparaison internationale

L'étude marocaine révèle une forte croyance en des causes surnaturelles pour expliquer l'épilepsie (possession, mauvais œil, sorcellerie), une perception partagée dans de nombreux pays en développement. Au Pakistan, une faible minorité seulement a des informations provenant de sources externes au cercle familial. En Corée du Sud, plus de 78% des personnes interrogées ont obtenu leurs informations de leur entourage. En Oman, 65% associent l'épilepsie à des forces surnaturelles (djinn). Des études au Laos montrent que 42,2% de la population relie l'épilepsie au surnaturel, souvent perçue, selon la foi bouddhiste, comme une punition pour des mauvaises actions dans des vies antérieures. Parmi les hispaniques d'Amérique, 8% attribuent la maladie aux péchés et 9% au manque de foi. Au Sri Lanka, 6,3% des ruraux l'attribuent à des causes surnaturelles. En Zambie, un quart du clergé la considère comme une possession démoniaque, et 33,5% comme de l'ensorcellement. Cette comparaison internationale souligne la persistance de croyances surnaturelles concernant l'épilepsie dans de nombreux pays.

2. L épilepsie et la maladie mentale une perception erronée répandue

La perception erronée de l'épilepsie comme une maladie mentale est également fréquente dans les pays en développement. Au Vietnam, en Malaisie, en Thaïlande et au Brésil, les pourcentages de personnes associant l'épilepsie à la folie varient de 18% à 40%. Au Laos et en Zambie, ces chiffres sont respectivement de 45% et 54,8%. En revanche, en Corée, Jordanie et aux Émirats Arabes Unis, les pourcentages sont bien plus bas (entre 4,4% et 9%). Cette association de l'épilepsie à la folie souligne un manque d'information et de compréhension de la maladie. L'étude marocaine montre que certaines personnes expliquent les crises par des attaques d'entités surnaturelles, illustrant à nouveau cette association erronée à un trouble mental. Cette comparaison internationale met en lumière la nécessité d'éduquer la population sur la nature neurologique de l'épilepsie et de lutter contre les préjugés.

3. Conduites à tenir face à une crise d épilepsie comparaison des pratiques

La comparaison internationale révèle de grandes disparités dans les connaissances et les pratiques face à une crise d'épilepsie. Seulement 5% des participants marocains savent intervenir de manière appropriée, contrairement à la Turquie (25%), les États-Unis (20%) et la Thaïlande (11,4%). Au Laos et en Jordanie, en revanche, la majorité des personnes interrogées connaissent les gestes de premiers secours. L'introduction d'objets dans la bouche du patient est une pratique inappropriée et dangereuse, très répandue selon plusieurs études. D'autres pratiques nocives sont mentionnées : maîtriser le patient au sol, lui attacher les membres, lui verser de l'eau dessus. Ces données soulignent l'urgence de programmes d'éducation thérapeutique pour enseigner les gestes appropriés en cas de crise. L’écart important entre les pratiques marocaines et celles d'autres pays illustre l'ampleur du travail à réaliser pour améliorer la prise en charge des crises d'épilepsie.

IV.Impact Socio économique et Législatif

L'épilepsie entraîne une stigmatisation importante impactant la vie sociale et le bien-être des patients. Des études montrent des conséquences sur le mariage et l'emploi. Le projet de recherche suggère une analyse de la législation concernant l’épilepsie afin de promouvoir les droits humains des personnes atteintes de cette maladie. La mise en place de programmes de soutien et de lutte contre la discrimination apparaît essentielle pour améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d'épilepsie.

1. Stigmatisation et conséquences socio économiques de l épilepsie

L'épilepsie engendre une stigmatisation importante impactant significativement la qualité de vie des personnes atteintes. Une étude menée dans dix pays européens révèle que les préjugés constituent un facteur majeur de stigmatisation et de tabous. En Chine, l'épilepsie réduit les chances de mariage, particulièrement pour les femmes (72% des parents s'opposant à un mariage avec une personne épileptique en 1992). Aux Pays-Bas, la croyance en un lien entre l'épilepsie et la magie persiste. En Ouganda, la maladie est perçue comme contagieuse. Historiquement, dans de nombreux pays, les lois reflétaient la méconnaissance et la suspicion envers les épileptiques, interdisant le mariage et la procréation. En Inde et en Chine, cette interdiction persiste encore. Au Royaume-Uni, une loi interdisant le mariage aux épileptiques n'a été abrogée qu'en 1970. Aux États-Unis, plusieurs États ont également connu des lois similaires. Cette stigmatisation souligne le besoin urgent de programmes de sensibilisation et d’intégration sociale des personnes épileptiques.

2. Nécessité d une réforme législative pour la protection des droits des personnes épileptiques

Le document souligne la nécessité d'une réforme législative internationale pour mieux protéger les droits des personnes atteintes d'épilepsie. Un projet est mentionné, visant à collecter les lois et réglementations relatives à l'épilepsie dans les domaines des droits civils, de l'éducation et de l'emploi. L'objectif est d'évaluer l'efficacité de ces mesures légales à promouvoir et protéger les droits humains des épileptiques et de fournir des outils pour une réforme législative mondiale. Il s’agit également de promouvoir la connaissance de l’épilepsie chez les patients et d’améliorer leur intégration sociale. La réduction de la discrimination et de la stigmatisation liées à l'épilepsie est un objectif primordial. Cette réforme vise à améliorer la prise en charge des malades et leurs conditions de vie, en tenant compte de la dimension sociale et des conséquences néfastes de la stigmatisation.

V.Conclusion et Recommandations

L’étude met en lumière la nécessité urgente de programmes d'information, d'éducation, et de communication (IEC) pour lutter contre la stigmatisation et les fausses croyances entourant l’épilepsie au Maroc. La collaboration avec les tradipraticiens est également suggérée, ainsi que la mise en place d'une Journée Nationale contre l’épilepsie. L'objectif est d'améliorer la prise en charge globale de l'épilepsie, en tenant compte de son aspect socioculturel et religieux.

1. Nécessité de programmes d information d éducation et de communication IEC

L'étude conclut sur la nécessité impérieuse de mettre en place des programmes d'information, d'éducation et de communication (IEC) pour combler les lacunes de connaissances sur l'épilepsie, rectifier les attitudes et lutter contre les préjugés. Ces programmes doivent vulgariser l'aspect médical de la maladie tout en insistant sur son aspect socioculturel. Le patient, sa famille et le grand public doivent bénéficier de ces informations pour une prise en charge globale et efficace de la maladie. L'expérience de campagnes comme "Bringing Epilepsy Out of the Shadows" a prouvé l'efficacité de telles initiatives. Ces programmes doivent non seulement démystifier l'épilepsie, mais également favoriser l'intégration sociale des personnes atteintes et lutter contre la stigmatisation. Une meilleure compréhension de la maladie par l'ensemble de la société est indispensable pour une prise en charge globale et humaine des personnes atteintes d'épilepsie.

2. Recommandations pour améliorer la prise en charge de l épilepsie

Pour améliorer la prise en charge de l'épilepsie, le document recommande la mise en place de programmes d'information et d'insertion sociale, ainsi qu'une meilleure compréhension de la maladie par le patient, son entourage et le public. L'épilepsie doit être perçue comme une maladie neurologique universelle, non transmissible et curable. La Déclaration Africaine contre l'épilepsie est citée, encourageant le dialogue avec les tradipraticiens et la lutte contre les préjugés. L'institution d'une Journée Nationale contre l'épilepsie et le soutien à la recherche fondamentale et appliquée sont également recommandés. Ces recommandations visent à améliorer la prise en charge des malades et leurs conditions de vie en luttant contre la stigmatisation, les fausses croyances, et les pratiques traditionnelles inappropriées. La collaboration entre médecine moderne et traditionnelle, ainsi qu’une approche globale intégrant les aspects médicaux, sociaux et culturels, est essentielle pour une prise en charge optimale des personnes atteintes d'épilepsie.