Analyse de l'Arbitrage d'Investissement et du Droit International Général

Analyse de l'Arbitrage d'Investissement et du Droit International Général

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Langue French
Format | PDF
Taille 1.00 MB
  • arbitrage d'investissement
  • droit international
  • décisions arbitrales

Résumé

I. Arbitrage d investissement et sources du droit international

Cette section explore les sources du droit régissant l’arbitrage d'investissement, principalement fondé sur des traités bilatéraux ou multilatéraux. L’analyse porte sur l’interprétation des traités, en particulier à la lumière de la Convention de Vienne sur le droit des traités, soulignant l'importance de l'interprétation de bonne foi et de l'effet utile. L'application de la clause de la nation la plus favorisée (MFN) et ses limites sont également discutées. Le rôle de la coutume internationale et des principes généraux du droit sont examinés, ainsi que l’influence de la jurisprudence, notamment l'application de tests tels que le Higgins test, le Vivendi test, et d’autres principes issus de décisions emblématiques (ex: Philip Morris). L'article discute les différents standards d'interprétation et la diversité des résultats obtenus, même face à des principes d’interprétation communs (ex: affaire Orascom vs Capital Financial Holdings).

1. Sources du droit applicable à l arbitrage d investissement

Cette section initiale établit le fondement juridique de l'arbitrage d'investissement, largement basé sur des traités bilatéraux et multilatéraux. Elle souligne l'importance du droit des traités et l'application de la Convention de Vienne sur le droit des traités. L'interprétation des traités est au cœur de l'analyse, avec une insistance sur l'interprétation de bonne foi et le respect du sens ordinaire des termes (article 31, §1er de la Convention de Vienne). Le principe de l'effet utile, bien qu'implicite, est mis en lumière comme un élément majeur du raisonnement arbitral, servant par exemple à limiter la portée d'une clause de la nation la plus favorisée ou à clarifier l'effet de la dénonciation de la Convention de Washington. L'affaire Bear Creek est mentionnée comme exemple de l'utilisation de sources de droit inattendues, comme la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, pour éclairer le cadre juridique applicable, même sans jouer un rôle décisif dans le jugement. L'ensemble met en évidence la complexité des sources de droit mobilisées et la non-limitation au seul traité initialement invoqué pour l'Investor-State Dispute Settlement (ISDS).

2. Interprétation des traités et jurisprudence

L'analyse se penche ensuite sur les techniques d'interprétation des traités, notamment celles décrites dans la Convention de Vienne. L'interprétation de bonne foi suivant le sens ordinaire des termes est réaffirmée, avec l'utilisation de dictionnaires comme point de départ utile. L'affaire Beijing Urban Construction Group illustre l'ironie potentielle de juristes anglophones interprétant des traités dont les versions officielles sont rédigées dans d'autres langues. Le recours à d'autres moyens d'interprétation de la Convention de Vienne est abordé lorsque la traduction non-officielle ne suffit pas à lever les doutes. Le principe de l'effet utile est détaillé comme un élément central de l'interprétation, illustré par plusieurs exemples montrant son application pour limiter la portée de certaines clauses ou interpréter des délais de dénonciation. L'importance de l'interprétation donnée par la Commission du libre-échange concernant les normes minimales de traitement (ALENA, affaire Eli Lilly) est mentionnée. L'étude met en lumière l'influence des accords et pratiques ultérieures et des positions des États, même si leur rôle est souvent marginal. Le document souligne les divergences jurisprudentielles concernant l'interprétation de concepts comme le « siège social » (ex : affaires Orascom et Capital Financial Holdings), démontrant la complexité de l'interprétation dans le cadre de l'Investor-State Dispute Settlement (ISDS).

3. Conflits entre traités bilatéraux et droit de l Union européenne

Cette partie explore les conflits potentiels entre les traités bilatéraux d'investissement et le droit de l'Union européenne, notamment à la suite de l'arrêt Achmea. L'arrêt Achmea de la Cour de Justice de l'Union européenne est présenté comme un tournant majeur, déclarant incompatible avec le droit de l'Union européenne une clause d'arbitrage dans un traité bilatéral intra-européen. La Cour souligne la violation du principe d'autonomie du droit de l'Union et de l'exigence de coopération loyale. Le texte analyse les arguments des tribunaux arbitraux qui maintiennent leur position, notamment en invoquant l'absence d'identité de matière entre les traités bilatéraux et le droit de l'UE (articles 30 et 59 de la Convention de Vienne), ou en soulignant leur compétence limitée à l'interprétation du traité applicable. La divergence entre la Cour de Justice et les tribunaux arbitraux est mise en évidence, et les implications pour la mise en œuvre des sentences portant sur des différends intra-européens, en particulier concernant l'exequatur et l'exécution forcée, sont discutées. L'arrêt Achmea ne concerne que les traités bilatéraux intra-européens, mais son impact sur d'autres accords, comme le Traité sur la Charte de l'énergie ou le CETA, est évoqué, soulignant l'incertitude concernant leur compatibilité future avec le droit européen dans le domaine de l'Investor-State Dispute Settlement (ISDS).

II. Interprétation des traités

L'interprétation des traités en arbitrage d'investissement est analysée à travers le prisme de la Convention de Vienne sur le droit des traités. L’étude met l’accent sur l’interprétation de bonne foi, l’effet utile, et le rôle mineur des accords et pratiques ultérieures. Des exemples concrets illustrent la complexité de l’interprétation, notamment l’ambiguïté de termes comme «siège social» (affaires Orascom et Capital Financial Holdings), et l’application de la clause MFN. L’arrêt Achmea, déclarant incompatible une clause d’arbitrage avec le droit de l’Union européenne, est présenté comme un élément majeur impactant le Règlement des différends entre investisseurs et États (ISDS) intra-européens.

1. Principes généraux d interprétation des traités

L'analyse de l'interprétation des traités en matière d'arbitrage d'investissement commence par l'affirmation du principe d'interprétation de bonne foi, suivant le sens ordinaire des termes (article 31, §1er de la Convention de Vienne sur le droit des traités). Les tribunaux arbitraux insistent sur l'analyse textuelle précise du traité, décortiquant chaque terme et utilisant des dictionnaires comme point de départ. L'affaire Beijing Urban Construction Group illustre la difficulté, parfois ironique, d'une interprétation linguistique quand les juristes maîtrisent principalement l'anglais, alors que les versions officielles des traités sont rédigées dans d'autres langues. La traduction non-officielle étant parfois insuffisante pour lever tous les doutes, le recours aux autres moyens d'interprétation prévus par la Convention de Vienne est inévitable. Le principe de l'effet utile, bien que non explicitement codifié, joue un rôle crucial, permettant de rejeter les interprétations qui rendraient le traité inopérant. Plusieurs exemples démontrent son importance dans l'interprétation des clauses de règlement des différends, des clauses de la nation la plus favorisée, et de la dénonciation de la Convention de Washington. Le principe de l'effet utile, issu des commentaires de la Commission du droit international, est régulièrement utilisé par la Cour internationale de Justice, et son application est largement acceptée dans le domaine de l'arbitrage d'investissement.

2. Rôle des accords et pratiques ultérieurs et de la jurisprudence

Quant aux accords et pratiques ultérieurs mentionnés à l'article 31, paragraphe 3 de la Convention de Vienne, leur rôle reste marginal en quantité, à l’exception notable de l’affaire Eli Lilly et sa référence à une note de la Commission du libre-échange sur l'ALENA (article 1105). L'interprétation de la Commission s’impose aux tribunaux en vertu de l'article 1131 de l’ALENA. Dans d’autres cas, l’absence de réaction des États face à certaines décisions arbitrales a été interprétée comme une pratique ultérieure (affaire Standard Chartered), tandis que dans l’affaire Suez, les positions des États défendeurs ont été jugées trop contextuelles pour fonder une conviction juridique. L'interprétation du concept de « siège social » dans les traités de l’Union belgo-luxembourgeoise illustre les divergences jurisprudentielles. Des tribunaux, confrontés à des textes identiques et aux mêmes directives d'interprétation, arrivent à des conclusions opposées. Certains considèrent le siège social comme un critère de nationalité déterminé par le droit interne, tandis que d'autres y voient une notion autonome en droit international. Même au sein de cette dernière approche, des désaccords persistent quant à la distinction entre siège statutaire et siège effectif (comparer les affaires Orascom et Capital Financial Holdings). Cette divergence souligne la complexité de l’interprétation uniforme des traités dans le cadre de l’Investor-State Dispute Settlement (ISDS).

3. L arrêt Achmea et ses implications

L'arrêt Achmea de la Cour de Justice de l'Union européenne, rendu en 2018, est présenté comme un élément majeur impactant l'interprétation des traités d'investissement, notamment en Europe. La Cour a déclaré incompatible avec le droit de l'Union une clause d'arbitrage dans un traité bilatéral intra-européen. Cette décision soulève un conflit de normes entre le droit international et le droit de l'Union, imposant aux États membres de mettre fin aux traités concernés et à leurs juridictions d'annuler ou de refuser d'appliquer les sentences correspondantes. Le texte explore les possibles réactions des tribunaux arbitraux face à cet arrêt, qui pourraient maintenir leur interprétation distincte de celle de la Cour ou insister sur l'absence d'identité de matière entre les traités d'investissement et le droit de l'UE. La décision de la Cour pourrait conduire à une indifférence ou un dialogue avec les tribunaux arbitraux. Les difficultés pour la mise en œuvre des sentences dans les litiges intra-européens sont mises en évidence, concernant les procédures d'annulation, l'exequatur, et l'exécution forcée. L'arrêt Achmea reste circonscrit aux traités bilatéraux intra-européens mais son impact sur d'autres traités, incluant le Traité sur la Charte de l'énergie et le CETA, reste incertain.

III. Autres sources du droit international

Cette partie examine le rôle de la coutume internationale et des principes généraux du droit dans le cadre de l’arbitrage d'investissement. L’influence de la coutume dans la définition des normes de protection des investisseurs et l’imputation de la responsabilité de l’État sont analysées (ex : affaire Caratube). L’étude souligne l’importance de la jurisprudence arbitrale, même en l’absence de stare decisis, avec l’émergence de principes et tests issus de décisions précédentes (ex: Micula test, Trans-Global test, etc.). L'application du droit interne, notamment sur des questions de nationalité et de légalité de l’investissement, est également abordée. La porosité de la distinction entre les articles 4 et 5 des Articles de la CDI de 2001 sur la responsabilité de l’État est illustrée par l'affaire UAB E Energija.

1. Le rôle de la coutume et des principes généraux du droit

Bien que l'arbitrage d'investissement repose principalement sur l'application de traités spécifiques, la coutume internationale joue un rôle significatif. Elle sert à compléter les obligations primaires des traités, notamment en matière de responsabilité de l'État. La coutume contribue également à préciser le sens des règles primaires, notamment concernant les standards de protection des investisseurs. Dans certains cas, les arbitres s'appuient sur le droit coutumier ou sur des principes généraux de droit international ('international public policy') pour interdire la protection d'investissements obtenus par corruption. L’hésitation du tribunal de l’affaire Caratube quant à la valeur à accorder au droit coutumier, même si les parties ont contractuellement opté pour le droit kazakh, illustre la complexité de la question. Le tribunal a finalement semblé privilégier les 'mandatory rules of international law', ce qui suggère une hiérarchie normative où le droit interne ne prévaut pas sur le droit international coutumier impératif. Cette section souligne donc l’importance non seulement du droit conventionnel mais aussi du droit international coutumier dans le cadre de l’Investor-State Dispute Settlement (ISDS).

2. L influence de la jurisprudence arbitrale

L'analyse se poursuit en étudiant l'influence de la jurisprudence arbitrale, bien que le système ne soit pas fondé sur le stare decisis. Les décisions arbitrales, même intermédiaires, possèdent une force persuasive importante. L’émergence de principes et tests nommés d'après des décisions emblématiques est observée : Higgins test, Vivendi test, Micula test, Trans-Global test, Azinian principle, Glamis standard. La sentence Philip Morris (2016), concernant les expropriations indirectes, est présentée comme un exemple de jurisprudence constante. Les arbitres peuvent se référer à leurs propres travaux doctrinaux ou aux écrits universitaires des conseils, ce qui témoigne d'une interaction entre théorie et pratique. Le débat doctrinal sur le rôle des précédents est évoqué, opposant ceux qui prônent une certaine cohérence jurisprudentielle (Kaufman-Kohler) à ceux qui défendent une analyse de novo pour chaque cas (Stern). La pratique arbitrale oscille entre ces deux approches. Des divergences d'interprétation peuvent surgir même sur des points apparemment similaires, comme le montrent les différentes interprétations des clauses de la nation la plus favorisée ou de la notion de 'siège social' (affaires Orascom et Capital Financial Holdings). L'étude met en avant la complexité de la jurisprudence arbitrale dans le domaine de l’Investor-State Dispute Settlement (ISDS).

3. Attribution de la responsabilité de l État et droit interne

Cette partie se concentre sur l’imputation de la responsabilité de l’État, en particulier dans le contexte de l’affaire UAB E Energija. L’analyse examine la qualification des actes de différents acteurs étatiques (municipalité, autorité de régulation, sociétés municipales) en tant qu’actes imputables à l’État. L'article 4 des Articles de la CDI de 2001 sur la responsabilité de l’État est appliqué pour l’imputation des actes de la municipalité. La qualification de l'autorité de régulation comme organe de l'État est discutée, en se basant sur sa nature administrative et le contrôle juridictionnel de ses actes. Une approche subsidiaire considérant l'autorité de régulation comme entité exerçant des prérogatives de puissance publique est également envisagée. La question de l'attribution des actes de sociétés municipales est abordée. Le tribunal rejette la qualification d'exercice de pouvoirs étatiques, mais impute les actions des sociétés à l'État en raison d'éléments indirects prouvant l'implication de la Lettonie. Cette analyse est comparée à la sentence Ampal, mettant en lumière l'utilisation de différents critères d’attribution (instructions, direction, contrôle). L'utilisation de la clause de la nation la plus favorisée pour importer une règle d'imputation d'un autre traité (Lettonie/États-Unis) est également examinée et rejetée par le tribunal. Le texte illustre la complexité de l’imputation de la responsabilité de l’État au travers de ces différentes affaires, en particulier concernant les entreprises d’État, les actes de jure gestionis et les recours à des critères alternatifs tels que les « critères Broches ».

IV. Incidents de procédure

Cette section traite des aspects procéduraux de l’arbitrage d'investissement, notamment les récusations d’arbitres (ex: tentative de récusation d’Yves Fortier dans l’affaire Fábrica de Vidrios Los Andes), les interventions d’amici curiae (ex: affaire Infinito Gold, Bear Creek Mining), et l’octroi de mesures provisoires. La jurisprudence concernant l’autorité des décisions intermédiaires et le principe de la chose jugée sont analysés, en soulignant les divergences de pratique (ex: affaires Ampal c. Égypte et Lao Holdings c. Laos). L'abus de droit, notamment le dépôt de multiples requêtes pour un même investissement (ex: affaire Orascom), est examiné.

1. Récusations et interventions d amici curiae

Cette section aborde les incidents de procédure, notamment les demandes de récusation des arbitres et les interventions d’amici curiae. Les récusations sont présentées comme rares et exceptionnelles, illustrées par le cas d'Yves Fortier dans l’affaire Fábrica de Vidrios Los Andes, où une quatrième demande de récusation a été rejetée. Le texte souligne le caractère casuistique de ces décisions, tributaire des circonstances spécifiques de chaque affaire. L’exemple de deux arbitres membres de Chambers britanniques, dont d’autres membres représentent le Chili devant la CIJ, illustre la complexité de l’évaluation de l’impartialité. Concernant les interventions d’amici curiae, le document note la variabilité de la pratique des tribunaux arbitraux et la difficulté d’identifier des paramètres explicatifs clairs. L’affaire Infinito Gold est citée comme exemple où la position d’un amicus curiae (une association environnementale) était en décalage avec celle de l’État défendeur, soulignant la différence entre une posture de principe et une argumentation juridiquement étayée. L’affaire Bear Creek Mining montre que même lorsque l’intervention est acceptée, les tribunaux peuvent se dispenser de s’appuyer sur les arguments présentés par les amici curiae, illustrant la marge de manœuvre des tribunaux à cet égard. La question de la pertinence d'accepter des interventions tierces dont l’utilité reste incertaine est soulevée.

2. Mesures provisoires et demandes reconventionnelles

La section traite ensuite du caractère exceptionnel des mesures provisoires, admis tant dans le cadre du CIRDI que hors CIRDI. Les conditions d'octroi de ces mesures dépendent du règlement d'arbitrage applicable. L’aspect le plus important est l’autorité des décisions conservatoires ou provisoires, notamment au sein du CIRDI, où les tribunaux peuvent seulement « recommander » ces mesures. Les réactions des tribunaux varient : certains appliquent une interprétation littérale de la convention, tandis que d'autres ordonnent ces mesures sans justification explicite. Le texte souligne la difficulté à concilier la forme (simple recommandation) et la pratique (respect des mesures par les parties), en s’appuyant sur l’affaire LaGrand et la Cour internationale de Justice pour illustrer le caractère implicitement obligatoire des mesures conservatoires. L’analyse se penche sur les affaires Burlington et Perenco, où une demande reconventionnelle de l’Équateur contre deux investisseurs, dans un contexte factuel similaire, a été examinée. Le tribunal a privilégié l’effectivité des demandes reconventionnelles, même si cela implique un risque de double indemnisation, démontrant une volonté de garantir la possibilité de se prononcer sur la seconde demande reconventionnelle, même en cas d'annulation de la première. L'imbrication des deux affaires illustre une volonté de défendre l'institution de la demande reconventionnelle, en raison de sa valeur symbolique.

V. Compétence du tribunal arbitral

Cette section aborde la question de la compétence du tribunal arbitral, notamment la compétence temporelle et la prescription. Elle examine le rôle du consentement des parties (article 72 de la Convention de Washington, ex: affaire Fabrica de Vidrios), la nécessité d’un consentement clair et explicite, et les différentes approches jurisprudentielles concernant la prescription extinctive (ex: affaire UAB Energija, Eli Lilly c. Canada). La distinction entre compétence et recevabilité est détaillée, avec ses implications pratiques sur les recours en annulation.

1. Consentement et compétence du tribunal arbitral

Cette section analyse la compétence du tribunal arbitral, en particulier la nécessité d'un consentement clair et explicite des parties. Le texte souligne que le consentement, requis pour fonder la compétence, doit être exprimé non seulement par l'État dans le traité bilatéral d'investissement (TBI), mais aussi par l'investisseur dans sa requête. L'absence de ce consentement parfait empêche la compétence du tribunal, comme le montre l'exigence d'un certificat pour certains investissements. Une loi nationale acceptant la compétence du CIRDI ne suffit pas si les conditions prévues dans cette loi ne sont pas respectées. Le document illustre ce principe à travers l'affaire Société Resort Company, où la rédaction ambiguë de l'article 20 du code d'investissement local a rendu l'interprétation du consentement difficile. L'analyse précise que le consentement de l'investisseur doit être clairement exprimé et non pas implicitement déduit d'une simple demande d'agrément. Même si le texte évoque la nécessité d'un consentement explicite, l'interprétation de cette exigence varie selon la pratique jurisprudentielle. L’affaire Fabrica de Vidrios illustre une approche stricte du consentement parfait, exprimé avant la notification de la dénonciation du traité, pour activer l’article 72 de la Convention de Washington et fonder la compétence du CIRDI.

2. Compétence temporelle et prescription

La section aborde ensuite la compétence temporelle du tribunal arbitral et la question de la prescription. L’existence d’une doctrine de la prescription extinctive en droit international est reconnue, mais son application est soumise à des conditions et réserves. Une prescription prévue par le droit interne n'est pas opposable à une juridiction internationale, mais cette dernière peut en tenir compte (utilisation du droit national dans l’affaire mentionnée). Dans l’affaire UAB Energija, bien que le traité ne prévoie pas de prescription, le tribunal arbitral mentionne qu’une période de moins de quatre ans entre la notification du différend et la requête est insuffisante pour faire jouer la prescription, ce qui sous-entend l’existence d’un tel principe en droit international. La distinction entre compétence et recevabilité est fondamentale, et le texte explore ses implications en matière de prescription. Une demande prescrite est irrecevable, mais cela n'affecte pas la compétence du tribunal en soi. L’analyse détaille les conséquences pratiques de cette distinction, notamment la flexibilité procédurale, la possibilité de renoncer à certains obstacles, l’autorité de la chose jugée, et l’applicabilité de la clause de la nation la plus favorisée. La question de la prescription est souvent liée à la recevabilité de la demande, et non pas toujours à la compétence du tribunal. Le texte met en perspective la distinction entre l’affaire Eli Lilly c. Canada, où la question de la prescription était centrale en raison de la période écoulée entre le manquement allégué et le dépôt de la requête, et la jurisprudence plus générale sur la compétence temporelle et les questions de recevabilité.

3. Compétence et recevabilité implications pour l annulation

L’analyse de la distinction entre compétence et recevabilité continue en examinant ses implications pour la phase d’annulation. L’excès de pouvoir, motif d’annulation, est plus difficile à caractériser en cas de décision sur la recevabilité qu’en cas de décision sur la compétence, en raison de la plus grande marge de manœuvre des tribunaux concernant la recevabilité. Le droit français de l’arbitrage est évoqué, prévoyant l’annulation si le tribunal s’est déclaré à tort compétent ou incompétent. Le texte met en évidence l’importance de cette distinction dans le cadre du CIRDI, où l’excès de pouvoir doit être manifeste. L’obligation de renoncer aux recours internes, de notifier le litige, la saisine préalable d’instances nationales, et l’abus de procédure sont illustrés comme des questions de recevabilité, et non de compétence. Le texte souligne une certaine contradiction jurisprudentielle quant au traitement de l’exigence de négociation préalable, parfois traitée comme une question de compétence. La distinction entre compétence et recevabilité a des conséquences significatives lors de la phase d'annulation des sentences. L’excès de pouvoir est plus facilement caractérisé en cas d'erreur de compétence qu'en cas d'erreur de recevabilité, car la marge d'appréciation du tribunal est plus importante pour cette dernière. La section conclut en soulignant le caractère plus essentiel des questions de compétence, les rendant moins protégées contre les risques d’annulation.