Évaluation du Soutien Clinique Universitaire dans les Maternités Provinciales

Évaluation du Soutien Clinique Universitaire dans les Maternités Provinciales

Informations sur le document

Auteur

Mme. Mouna Nassaf

École

Université Cadi Ayyad, Faculté de Médecine et de Pharmacie Marrakech

Spécialité Médecine
Lieu Marrakech
Type de document Thèse
Langue French
Format | PDF
Taille 1.04 MB
  • soutien clinique
  • maternités provinciales
  • mortalité maternelle

Résumé

I.Le Projet SCUMaP Amélioration des Soins Obstétricaux d Urgence au Maroc

Ce document détaille l'évaluation d'un projet pilote marocain, le « Soutien Clinique Universitaire des Maternités Provinciales (SCUMaP) », visant à réduire la mortalité maternelle et néonatale. Mis en œuvre par le CHU Mohammed VI de Marrakech, en collaboration avec le FARGO (Rabat) et la cellule régionale de coordination du projet « santé de la reproduction », le SCUMaP apporte un soutien technique, clinique et organisationnel aux équipes des maternités provinciales, notamment dans la prise en charge des soins obstétricaux d'urgence (SOU). L'approche multidisciplinaire du projet inclut des enseignants universitaires, des gestionnaires et des sages-femmes, axée sur l'amélioration de la qualité des soins et la mise en œuvre du concept des « trois délais » pour une meilleure prévention de la mortalité maternelle. Le projet a couvert les régions de Marrakech Tensift Al Haouz et Tadla Azilal, avec des interventions pilotes dans les hôpitaux d’Azilal, El Kelaa des Sraghna et Essaouira.

1. Contexte et Objectifs du SCUMaP

En 2004, le CHU Mohammed VI, créé en 2003 et desservant environ 6 millions d'habitants dans les régions de Marrakech Tensift Al Haouz et les régions sud du Maroc, a lancé le projet SCUMaP (Soutien Clinique Universitaire des Maternités Provinciales). Ce projet, issu d'une volonté d'améliorer la qualité des soins et de réduire la mortalité maternelle, s’inscrit dans la continuité des efforts nationaux pour une maternité sans risque (MSR), initiés bien avant avec des actions d'accompagnement des accoucheuses traditionnelles, la CPN (Consultation Prénatale) et des stratégies mobiles, culminant avec la conférence de Marrakech sur la MSR en 1991 et la CIPD (Conférence internationale sur la population et le développement) en 1994. Le SCUMaP vise spécifiquement à améliorer la prise en charge des accouchements et des complications obstétricales au sein des maternités provinciales, en apportant un soutien technique, clinique et organisationnel aux équipes locales. Le projet s’appuie sur une approche intégrée, globale et participative, impliquant une équipe multidisciplinaire composée d’enseignants universitaires, de gestionnaires et de sages-femmes. L'amélioration de l'accès et de la qualité des soins obstétricaux d’urgence (SOU) est au cœur des préoccupations du projet, en intégrant notamment le concept des trois délais pour une meilleure prévention de la mortalité maternelle.

2. Partenariats et Mise en Œuvre du SCUMaP

Le SCUMaP a bénéficié de collaborations importantes. Le projet a une double composante : régionale (Marrakech-Tensift-Haouz) et nationale, avec des interventions pilotes initialement locales ayant ensuite une portée nationale. Les activités opérationnelles sont principalement centrées sur les SOU (Soins Obstétricaux d’Urgence). Le CHU Mohammed VI de Marrakech a joué un rôle central, travaillant en collaboration avec le FARGO (Rabat) et la cellule régionale de coordination du projet « santé de la reproduction ». Plusieurs maternités des régions de Marrakech Tensift Al Haouz et Tadla Azilal ont été visitées entre 2003 et 2005. Le projet s'appuie sur des améliorations significatives, telles que l'intégration du concept des trois délais dans le monitorage et l'importance accordée à la qualité des soins. Il a permis une augmentation du taux d'accouchements et de césariennes. L’expérience s’inscrit dans un contexte plus large d’amélioration des services de santé au Maroc, avec des initiatives similaires menées par le Ministère de la Santé, parfois avec l'assistance technique de l'AMDD (Association Marocaine pour le Développement et la Démographie) et l'UNFPA (Fonds des Nations Unies pour la population).

3. Approche Méthodologique du SCUMaP

Le soutien clinique du SCUMaP dans le domaine des soins obstétricaux d'urgence se base sur une évaluation des services obstétricaux des établissements hospitaliers provinciaux, principalement des structures de type SOUC. Des équipes de superviseurs externes, composées de professeurs universitaires en gynécologie-obstétrique, de spécialistes en santé publique, de gestionnaires de programmes de MSR, et de sages-femmes, effectuent des évaluations basées sur l'observation directe et des entretiens avec les prestataires de soins. L’objectif est d’améliorer la qualité des soins à travers une approche diagnostique (évaluation des besoins) et une approche corrective. Le SCUMaP utilise une trousse d'outils complète, incluant des audits cliniques, le monitorage obstétrical, la supervision des structures et des processus de soins, l'analyse des problèmes de référence et contre-référence, et l'appui clinique à l'équipe soignante. Les missions durent 5 jours et incluent une formation pratique. Des questionnaires adressés aux responsables administratifs, au personnel médical et paramédical (dont les sages-femmes) permettent d'évaluer l'apport du projet du point de vue du personnel. L’utilisation des indicateurs de performance et l'analyse des recommandations de la réunion de synthèse après chaque mission constituent également des éléments clés de l'évaluation.

II.Méthodologie d Évaluation du SCUMaP

L'évaluation du SCUMaP s'est appuyée sur plusieurs méthodes : l'analyse des données des grilles d’observation utilisées par l’équipe du CHU Mohammed VI, le suivi des recommandations de la réunion de synthèse, l’analyse des indicateurs de performance (taux de césariennes, taux de létalité maternelle, etc.) avant, pendant et après l’intervention du SCUMaP, et un questionnaire adressé au personnel médical et administratif des maternités visitées. L'objectif était de mesurer l'impact du projet sur la qualité des soins et la réduction de la mortalité maternelle.

1. Méthodes d Évaluation du SCUMaP

L'évaluation de l'impact du SCUMaP a été menée à l'aide de plusieurs méthodes complémentaires. Premièrement, l'étude a analysé les données recueillies via une grille d'observation utilisée par l'équipe du CHU Mohammed VI. Cette grille permettait de suivre l'évolution des pratiques et de relever des points d'amélioration sur le terrain. Deuxièmement, le degré de réalisation des recommandations formulées lors des réunions de synthèse post-intervention a été évalué. Ceci a permis d'évaluer la mise en œuvre concrète des actions suggérées dans les maternités visitées. Troisièmement, l'analyse des indicateurs de performance a joué un rôle crucial. Il s’agissait d’étudier l'évolution des indicateurs de performance (par exemple, le taux de césariennes, le taux de mortalité maternelle, le taux d'utilisation des services, etc.) dans les établissements avant, pendant et après l'intervention du SCUMaP. Cette approche longitudinale cherchait à déterminer l’impact réel du projet sur la qualité des soins et les résultats de santé. Enfin, un questionnaire a été administré auprès des responsables administratifs (délégués du Ministère de la Santé et directeurs d'hôpitaux), du personnel médical (gynécologues, pédiatres) et paramédical (sages-femmes) des maternités concernées. Cela a permis de recueillir des données qualitatives sur la perception de l'apport du SCUMaP par les professionnels de santé eux-mêmes. L’analyse de ces données multiples et la triangulation des résultats issus de différentes sources ont permis une évaluation plus robuste et nuancée du programme.

2. Indicateurs de Performance et Analyse des Résultats

L'évaluation s'est appuyée sur des indicateurs de performance pour mesurer l'impact du SCUMaP sur la qualité des soins et la réduction de la mortalité maternelle. Ces indicateurs portaient sur différents aspects, tels que le taux de césariennes réalisées, le taux de satisfaction des femmes concernant la prise en charge des complications obstétricales et le plus important, le taux de mortalité maternelle. Les résultats ont révélé une variabilité dans le degré d'amélioration entre les différentes maternités. Le taux de réalisation des recommandations émanant des réunions de synthèse variait considérablement, passant de 50% à 83,3% selon l’hôpital. De même, l’amélioration des remarques de la grille de supervision fluctuait entre 47,5% et 80,9%, soulignant les disparités dans l’application des recommandations et la mise en place des meilleures pratiques. Il est important de noter que l’étude a mis en évidence la difficulté d'attribuer uniquement au SCUMaP les améliorations observées. D’autres facteurs, comme le renforcement des ressources humaines, l’amélioration de l’équipement ou les conditions climatiques, pouvaient également influencer les résultats. Malgré ces nuances, l'étude conclut que la majorité du personnel a bénéficié d'une formation de proximité et d'un encadrement de qualité grâce au SCUMaP, contribuant à un meilleur encadrement et une amélioration de la qualité des soins.

3. Limitations et Difficultés Rencontrées

L'évaluation du SCUMaP a mis en lumière plusieurs difficultés et limitations. La mobilité du personnel, avec des mutations vers d'autres provinces sans passation de consignes, a complexifié le suivi des recommandations. Le manque d'information préalable sur les visites des équipes du SCUMaP dans certaines maternités a également limité l’impact des interventions. De plus, la durée des missions de soutien clinique, parfois réduite par rapport à la durée prévue (5 jours), a affecté la mise en œuvre complète du programme. L'absence de relations fonctionnelles avec les services de soins de santé de base et le manque d’auto-évaluation au sein des structures ont été pointés comme des faiblesses importantes. En outre, des disparités dans l’application des méthodes d’évaluation ont été observées entre les équipes, soulignant la nécessité de standardiser les outils et de renforcer la coordination entre les intervenants. Enfin, l’étude souligne la nécessité d'explorer d'autres facteurs déterminants dans l’amélioration de la qualité des soins et de la réduction de la mortalité maternelle, outre l'intervention du SCUMaP lui-même. Ces limitations soulignent la nécessité d’adapter et d’améliorer l’approche du SCUMaP pour garantir un impact maximal sur le terrain.

III.Résultats et Impact du SCUMaP sur la Réduction de la Mortalité Maternelle

Les résultats montrent une amélioration variable du degré de réalisation des recommandations (50% à 83,3%) et une amélioration du respect des points de la grille de supervision (47,5% à 80,9%) selon les hôpitaux. Bien qu'une tendance favorable soit observée concernant les indicateurs de performance, il est difficile d’attribuer uniquement au SCUMaP cette amélioration, d’autres facteurs (ressources humaines, équipement) pouvant jouer un rôle. Néanmoins, le projet a permis une formation de proximité et un encadrement de qualité pour le personnel des maternités, contribuant à une meilleure prise en charge des complications obstétricales et améliorant ainsi la réduction de la mortalité maternelle dans les zones ciblées. Le projet a également permis de mieux maîtriser la référence et la contre-référence des cas compliqués.

1. Résultats de l Évaluation du SCUMaP sur la Réduction de la Mortalité Maternelle

L'évaluation du projet SCUMaP a révélé des résultats variables quant à son impact sur la réduction de la mortalité maternelle. Le taux de réalisation des recommandations formulées lors des réunions de synthèse, après les visites dans les maternités, a montré des disparités importantes selon les établissements. Ainsi, le pourcentage de réalisation a oscillé entre 50% et 83,3% selon le site (Azilal, El Kelaa des Sraghna, Essaouira). De même, l'amélioration des remarques de la grille de supervision a connu des variations significatives, allant de 50% à 80,9%. L’analyse des indicateurs de performance a révélé une tendance générale favorable, mais l’étude précise qu'il est difficile d'attribuer ces améliorations uniquement à l'intervention du SCUMaP. D’autres facteurs, comme le renforcement des ressources humaines, l'amélioration de l'équipement, ou des conditions générales, peuvent avoir joué un rôle. Malgré cette nuance, l’évaluation souligne l'apport significatif du projet en termes de formation de proximité et d'encadrement de qualité du personnel des maternités. Cette formation a amélioré la prise en charge des complications obstétricales, et contribue à la réduction de la mortalité maternelle.

2. Analyse des Indicateurs de Performance et leur Lien avec la Mortalité Maternelle

L’analyse des indicateurs de performance a été une composante majeure de l’évaluation du SCUMaP. Les données recueillies portaient sur divers aspects de la prise en charge obstétricale, dont le taux de césariennes, le taux de satisfaction des patientes concernant la prise en charge des complications obstétricales, et surtout le taux de mortalité maternelle. L’objectif était de mesurer l'impact du projet sur la réduction de la mortalité maternelle et néonatale, un objectif primordial du SCUMaP. Les résultats ont montré une tendance positive, mais il est important de souligner que cette tendance ne peut pas être uniquement attribuée à l’intervention du SCUMaP. L'étude mentionne que d'autres facteurs, liés aux ressources humaines, à l'équipement ou à des conditions externes, ont pu influencer les résultats. Néanmoins, le projet a indéniablement favorisé une amélioration de la qualité des soins grâce à la formation et l’encadrement offert au personnel médical et paramédical, contribuant à une meilleure prise en charge des complications obstétricales et, par conséquent, à la réduction de la mortalité maternelle.

3. Facteurs Influençant les Résultats et Limites de l Étude

L'évaluation met en évidence plusieurs facteurs qui ont pu influencer les résultats, rendant difficile une attribution exclusive des améliorations observées au SCUMaP. Parmi ces facteurs, on retrouve le manque de personnel, les problèmes structurels des maternités, la mobilité du personnel entre les provinces, l’absence de passation de consignes et le manque d'information préalable sur les visites du SCUMaP. La durée des missions de soutien, parfois plus courte que prévue (3 jours au lieu de 5), a également pu affecter l’impact des interventions. De plus, l'absence de relations fonctionnelles avec les services de soins de santé de base et le manque d'auto-évaluation au sein des maternités ont été pointés comme des faiblesses importantes. Enfin, l’évaluation souligne l’importance de contextualiser les résultats. Le fait que les maternités étudiées assurent 60% des accouchements de la région et servent de référence pour les grossesses à risque complexifie l’analyse de l'impact direct du SCUMaP sur la réduction de la mortalité maternelle. En conclusion, l'évaluation montre une amélioration des pratiques, mais souligne aussi la complexité de l'évaluation de l’impact d’un tel programme sur des indicateurs aussi sensibles que la mortalité maternelle.

IV.Recommandations pour l Amélioration et la Pérennisation du SCUMaP

L’étude recommande la poursuite de recherches à plus grande échelle, l'organisation de réunions régionales pour harmoniser les pratiques entre les équipes, la création d'un comité ministériel pour la généralisation du projet et la pérennisation de l’approche Maternité sans risque (MSR). L'amélioration de la coordination et la standardisation des outils et méthodes du SCUMaP permettraient d’optimiser son impact sur la réduction de la mortalité maternelle à l'échelle nationale. Le renforcement des ressources humaines et l'amélioration des infrastructures restent des éléments cruciaux.

1. Recommandations pour l Amélioration du SCUMaP

L'évaluation du SCUMaP a permis d'identifier des axes d'amélioration pour optimiser son impact sur la réduction de la mortalité maternelle. L'étude recommande tout d'abord de mener des enquêtes à plus grande échelle afin de consolider les résultats et de mieux comprendre l'impact du programme. Il est également crucial de renforcer la coordination entre les différentes équipes du SCUMaP au niveau régional pour homogénéiser les méthodes d'évaluation et diminuer la variabilité inter-équipes observée. La standardisation des outils et des protocoles permettrait une meilleure comparabilité des résultats et une plus grande efficacité. Pour garantir la pérennité du programme, il est proposé de créer un comité ministériel chargé de suivre la généralisation du SCUMaP à l'ensemble du territoire national. Ce comité assurerait un suivi régulier et garantirait la cohérence de la mise en œuvre du programme. Enfin, il est proposé de renforcer les liens fonctionnels entre le SCUMaP et les services de soins de santé de base pour une meilleure articulation des interventions et une prise en charge globale de la santé maternelle. L'intégration d'une démarche d'auto-évaluation au sein des maternités permettrait également une amélioration continue des pratiques et une meilleure responsabilisation des équipes locales dans le processus d’amélioration continue de la qualité des soins.

2. Pérennisation du SCUMaP et Intégration dans le Système de Santé

Pour assurer la pérennisation du SCUMaP et garantir son intégration durable dans le système de santé marocain, plusieurs recommandations sont formulées. L'une des recommandations majeures est la création d’un comité ministériel chargé du suivi et de la généralisation du programme. Ce comité jouerait un rôle essentiel dans le maintien des actions entreprises par le SCUMaP, assurant la continuité des formations, le soutien technique aux maternités et la standardisation des pratiques. De plus, la mise en place de réunions régulières entre les membres des différentes équipes du SCUMaP permettrait un partage d’expérience et un apprentissage mutuel, améliorant ainsi la cohérence et l'efficacité des interventions. La formation sur l’utilisation des outils et des méthodes du SCUMaP, notamment en matière d’audit clinique, doit être étendue et renforcée, pour garantir une meilleure application des meilleures pratiques. La collaboration avec les services de soins de santé de base, afin d'assurer une prise en charge continue des femmes enceintes avant, pendant et après l’accouchement, est aussi essentielle pour garantir l'impact à long terme du programme dans la réduction de la mortalité maternelle. Enfin, l'intégration de mécanismes d'auto-évaluation au sein des structures de santé permettrait une amélioration continue des pratiques et un meilleur suivi des résultats sur le terrain, garantissant ainsi la pérennisation des efforts pour une maternité sans risque (MSR).