Thèse sur les Formes Graves du Psoriasis

Thèse sur les Formes Graves du Psoriasis

Informations sur le document

Auteur

Mr. Tarik Bouzekroui

instructor/editor Mme. S. El Hassani (Professeur de Rhumatologie)
École

Université Cadi Ayyad, Faculté de Médecine et de Pharmacie Marrakech

Spécialité Médecine
Lieu Marrakech
Type de document Thèse
Langue French
Format | PDF
Taille 1.84 MB
  • Psoriasis
  • Médecine
  • Dermatologie

Résumé

I.Formes Graves de Psoriasis Érythrodermique et Pustuleux

Ce document traite des formes sévères de psoriasis, notamment le psoriasis érythrodermique et le psoriasis pustuleux. L'érythrodermie psoriasique, caractérisée par une éruption rouge intense et étendue, peut se présenter sous une forme sèche ou humide et œdémateuse. Le psoriasis pustuleux, quant à lui, se manifeste par des pustules (psoriasis pustuleux palmoplantaire de Barber, psoriasis pustuleux acral, psoriasis pustuleux annulaire de Bloch-Lapierre). Ces formes graves peuvent engendrer des complications significatives, impactant la qualité de vie et le pronostic fonctionnel du patient, nécessitant souvent une prise en charge hospitalière. Le score PASI est un outil d'évaluation de la sévérité du psoriasis.

1. Érythrodermie Psoriasique Description et Classification

Le document décrit l'érythrodermie psoriasique comme une forme grave de psoriasis, se distinguant par son impact fonctionnel et social plus que vital. Elle peut compliquer un psoriasis classique ou apparaître d’emblée. L'érythrodermie est caractérisée par un érythème intense et étendu, affectant la totalité du corps. Deux formes principales sont distinguées : la forme sèche, où des lésions non infiltrées laissent des espaces de peau saine, avec des squames se détachant facilement, et une forme humide et œdémateuse plus sévère, souvent liée à des facteurs surajoutés tels que des infections, des traitements locaux (UV, réducteurs, corticoïdes), ou des traitements généraux (corticothérapie). La distinction entre ces deux formes reste cependant discutable, des passages entre elles étant fréquents. Il est important de noter que l'érythrodermie ne présente pas toujours les caractéristiques cliniques et histologiques typiques du psoriasis, rendant son diagnostic difficile en l'absence d'un psoriasis vulgaire préexistant. Le prurit est souvent important dans la forme œdémateuse, moins dans la forme sèche. L'œdème infiltre la peau, la rendant tendue et luisante, avec un suintement qui agglomère les squames. Des fissures vite infectées peuvent apparaître dans les grands plis.

2. Psoriasis Pustuleux Localisé Types et Complications

Le document détaille plusieurs formes de psoriasis pustuleux localisé, mettant l'accent sur leurs caractéristiques cliniques et leurs complications potentielles. Le psoriasis pustuleux palmoplantaire de Barber, la forme la plus courante, souvent liée à l'intoxication tabagique, affecte les paumes et les plantes des pieds, devenant rapidement bilatéral et symétrique. Des pustules blanc jaunâtre, légèrement saillantes, peuvent être isolées ou confluentes. Le psoriasis pustuleux acral (acrodermatite de Hallopeau), considéré comme une variante du psoriasis palmoplantaire, se démarque par sa topographie : il débute à l’extrémité d’un doigt, souvent péri-unguéal, et s’étend progressivement. Les pustules, sur une base érythémateuse, se dessèchent en formant des squames jaunâtres. Le psoriasis pustuleux annulaire de Bloch-Lapierre, quant à lui, se caractérise par des lésions annulaires, érythémateuses, couvertes de squames intérieurement et de pustules extérieurement. L’évolution se fait de manière centrifuge. Les complications du psoriasis pustuleux sont fréquentes et graves : surinfection, septicémie, troubles thermorégulateurs, défaillances cardiovasculaires, détresse respiratoire, anémie, troubles hydroélectrolytiques et hypoprotidémie. La mort peut survenir suite à ces complications.

3. Évaluation de la Sévérité du Psoriasis

L'évaluation de la sévérité du psoriasis est cruciale pour adapter le traitement. Le document mentionne le score PASI (Psoriasis Area and Severity Index) qui quantifie la gravité de la maladie en intégrant différents paramètres. Il varie de 0 (pas d’atteinte) à 72 (sévérité maximale). Des études cliniques ont établi qu'une amélioration de 50 % du score PASI initial représente un objectif thérapeutique raisonnable pour considérer un médicament comme efficace. La compréhension des mécanismes inflammatoires sous-jacents au psoriasis est également abordée, impliquant les kératinocytes (producteurs de médiateurs de l’inflammation comme IL1, IL6, IL8), les molécules d’adhésion (intégrines et E-sélectine) facilitant le passage des lymphocytes, les polynucléaires neutrophiles, les cellules de Langerhans, et les lymphocytes CD4. L'activation de ces lymphocytes T suggère un lien avec les maladies auto-immunes, expliquant l'efficacité de la ciclosporine.

II. Psoriasis Vulgaire Généralisé et Arthrite Psoriasique

Le psoriasis vulgaire généralisé affecte l'ensemble du tégument, avec des lésions érythémato-squameuses variables (punctiformes, en gouttes, nummulaires, en plaques). L’atteinte des paumes et des plantes est fréquente. L'arthrite psoriasique, une complication fréquente, peut évoluer vers une polyarthrite psoriasique, avec des manifestations articulaires périphériques et parfois une atteinte axiale (sacro-iléite). Les signes radiologiques permettent de différencier l'arthrite psoriasique de la polyarthrite rhumatoïde. Le traitement de l'arthrite psoriasique peut inclure la sulfasalazine, le méthotrexate, le leflunomide et les agents biologiques anti-TNF alpha.

1. Psoriasis Vulgaire Généralisé Manifestations Cutanées

Le psoriasis vulgaire généralisé se caractérise par une atteinte cutanée totale. La lésion élémentaire est une tache érythémateuse surmontée de squames. Le grattage révèle une « rosée sanglante ». Les lésions sont variables : punctiformes (psoriasis punctata), en gouttes (guttata), nummulaires (en pièce de monnaie), ou en plaques de taille variable. Les paumes et les plantes peuvent être atteintes, présentant des taches squameuses jaunâtres, des « clous psoriasiques » (élevures cornées), des pulpites sèches, ou plus fréquemment une kératodermie palmoplantaire épaisse et dure, compliquée de fissures douloureuses. L’atteinte cutanée dans le psoriasis vulgaire généralisé est donc extensive et diverse dans ses manifestations, impactant significativement la qualité de vie du patient. La description précise des lésions et leur localisation sont importantes pour le diagnostic et la prise en charge thérapeutique. Le texte souligne la nécessité d'un examen minutieux de la peau afin de caractériser au mieux l'extension et la nature des lésions.

2. Arthrite Psoriasique De l Oligoarthrite à la Polyarthrite

L’arthrite psoriasique, complication fréquente du psoriasis, est détaillée dans le document. Elle se manifeste le plus souvent sous forme d’oligoarthrite (atteinte de quelques articulations), avec un début aigu ou subaigu, parfois progressif et insidieux. L’évolution vers une polyarthrite psoriasique se fait par poussées successives, de plus en plus étendues et durables. Cette forme est associée aux mêmes antigènes d’histocompatibilité que le psoriasis non arthropathique (Cw6, B13, B17 et B38), mais pas à B27. Les signes radiologiques, bien que proches de ceux de la polyarthrite rhumatoïde, présentent des nuances : arthrite érosive des interphalangiennes distales, destruction osseuse anarchique avec processus reconstructif (ostéophytose, prolifération périostée), et évolution possible vers de sévères lésions d’ostéolyse avec mutilation. L’évolution est généralement caractérisée par des poussées irrégulières entrecoupées de rémissions, avec un pronostic meilleur que la polyarthrite rhumatoïde, mais une atteinte unguéale plus fréquente. Des examens biologiques révèlent un syndrome inflammatoire, la recherche de facteurs rhumatoïdes étant souvent négative par les méthodes classiques, mais positive par immunofluorescence chez 50 % des psoriasiques.

3. Aspects Cliniques et Radiologiques de l Arthrite Psoriasique

La symptomatologie clinique et radiologique de l’arthrite psoriasique est comparée à celle de la spondylarthrite ankylosante. Une atteinte vertébrale et une sacro-iléite (jusqu'à 58 % des cas, souvent unilatérale et asymétrique) sont possibles. La présence de lésions articulaires périphériques associées, l’atteinte cervicale fréquente, les syndesmophytes atypiques (20 % des cas), et la faible évolutivité constituent des arguments pour un diagnostic d’origine psoriasique. L'étude de cas mentionne une patiente présentant un élargissement des sacro-iliaques, une résorption latérale des premières phalanges des mains, et un pincement de l’interligne articulaire du coude droit. Des enthésopathies calcifiantes, favorisées par les rétinoïdes, peuvent également survenir, notamment au talon (talalgies) et aux doigts (onycho-pachydermo-périostite psoriasique). La distinction avec d'autres pathologies rhumatismales, comme la polyarthrite rhumatoïde, repose sur plusieurs critères : absence de prédominance de genre, atteinte fréquente des articulations distales, implication de plusieurs articulations d'un même doigt, érythème, atteinte axiale et inflammation de l’enthèse. La destruction articulaire et osseuse est suivie d'une reconstruction anarchique, conduisant à des déformations caractéristiques.

III.Traitement du Psoriasis Sévère

Le traitement du psoriasis sévère est multidisciplinaire et dépend de la forme et de la sévérité de la maladie. Les traitements locaux incluent les dermocorticoïdes, les kératolytiques (acide salicylique), et les rétinoïdes locaux (tazarotène). Les traitements systémiques peuvent comprendre le méthotrexate, les rétinoïdes (acitrétine), la ciclosporine et les thérapeutiques biologiques. La PUVA-thérapie est également une option pour les formes étendues. Une étude rétrospective menée au service de Dermatologie du CHU Mohammed VI de Marrakech (2002-2008) sur 28 patients atteints de formes graves de psoriasis (psoriasis pustuleux, érythrodermique, arthrite psoriasique, et psoriasis vulgaire généralisé résistant) a montré une prédominance féminine (57%), un âge moyen de 44,5 ans, et une bonne réponse thérapeutique globale dans la majorité des cas, malgré un décès dû à un choc septique. L'impact socio-économique est significatif, 89% des patients de l’étude ayant un bas niveau socio-économique.

1. Traitements Locaux du Psoriasis Sévère

Le traitement du psoriasis sévère repose sur une approche combinant souvent des traitements locaux et systémiques. En ce qui concerne les traitements locaux, le document met en avant l’utilisation de dermocorticoïdes, souvent en première intention. Ces derniers sont utilisés seuls ou en association avec d’autres traitements. Leurs applications doivent être brèves pour éviter la tachyphylaxie (diminution de l'efficacité) et les effets secondaires. Une application séquentielle, en alternance avec des émollients, est recommandée, et l’arrêt du traitement doit être progressif pour prévenir les rechutes. Les kératolytiques, notamment l'acide salicylique (à des concentrations variables selon la localisation, le degré d'hyperkératose et l'âge du patient), sont également utilisés, surtout dans les cas de kératodermie palmoplantaire. Il est important de noter que les réducteurs (goudrons de houille) sont très peu utilisés actuellement en raison de leur odeur désagréable, de leur pouvoir irritant et de leur potentiel cancérigène. Les rétinoïdes locaux, tels que le tazarotène, sont une autre option pour le psoriasis chronique stable en plaques, avec une amélioration notable après 4 semaines. Enfin, les pansements occlusifs peuvent être utiles pour les lésions résistantes.

2. Traitements Systémiques du Psoriasis Sévère

Pour les formes sévères de psoriasis résistantes aux traitements locaux, le document détaille plusieurs options thérapeutiques systémiques. Le méthotrexate est souvent utilisé, surtout dans les cas de psoriasis résistant et d'arthrite psoriasique grave. Son utilisation en alternance avec d'autres traitements est recommandée pour limiter les effets secondaires. Il peut être combiné à la PUVA-thérapie, à l'UVB, ou à l'acitrétine. La ciclosporine A, un immunosuppresseur, est efficace à court terme mais réservée à long terme aux cas étendus et résistants. Les rétinoïdes, notamment l'acitrétine (qui a remplacé l'étrétinate), sont efficaces grâce à leur action sur la production de cytokines pro-inflammatoires. Ils sont souvent utilisés en association avec d'autres traitements. Une stratégie d'escalade des doses d'acitrétine est préférable pour le psoriasis érythrodermique et pustuleux. La PUVA-thérapie est indiquée pour les formes étendues où le traitement topique est insuffisant, avec une dose cumulée totale à ne pas dépasser. Enfin, la thérapie séquentielle, utilisant des agents spécifiques par séquences, est une approche récente visant à maximiser l'amélioration initiale, minimiser la toxicité à long terme et améliorer l'évolution globale du psoriasis sévère (exemple : ciclosporine initialement suivie de l’acitrétine).

3. Thérapeutiques Biologiques et Approche Multidisciplinaire

L'avancée des connaissances en immunopathologie du psoriasis a conduit au développement de nouvelles thérapeutiques biologiques immunorégulatrices. Ces traitements ciblent l'inflammation cutanée en inhibant les cytokines ou la migration et l'activation des lymphocytes T. L'efalizumab (Raptiva®), un modulateur de la migration des cellules T, est mentionné, mais sa commercialisation a été suspendue en raison d'effets secondaires graves. L'importance d'une surveillance rigoureuse et prolongée des patients sous biothérapies est soulignée, ainsi que le respect des indications validées. L'étude rétrospective menée à Marrakech (CHU Mohammed VI) sur 28 patients avec psoriasis sévère a montré que les dermocorticoïdes étaient utilisés seuls (50%) ou associés au méthotrexate (14%) ou aux rétinoïdes (14%). L'évolution a été généralement bonne, sauf un décès dû à un choc septique. L'étude conclut sur la nécessité d'une prise en charge multidisciplinaire du psoriasis sévère, incluant une prise en charge psychologique et tenant compte du contexte socio-économique (89% des patients de l'étude ayant un bas niveau socio-économique).

IV. Psoriasis chez l Enfant et pendant la Grossesse

Le psoriasis chez l'enfant est moins fréquent que chez l'adulte, avec un début parfois très précoce. Les formes en gouttes sont fréquentes, pouvant évoluer vers des formes en plaques. Les formes sévères sont rares et souvent résistantes aux traitements. La grossesse a généralement un effet bénéfique sur le psoriasis, avec une amélioration rapportée chez 56 à 63% des femmes, tandis que des poussées post-partum sont observées chez 87%.

1. Psoriasis chez l Enfant Particularités et Défis Thérapeutiques

Le psoriasis chez l'enfant est moins fréquent qu'à l'âge adulte, mais présente des particularités importantes. Environ 20 % des patients développent leur première manifestation avant 20 ans. Les formes en gouttes sont particulièrement fréquentes chez les jeunes enfants ou avant l'adolescence, évoluant parfois vers des formes en plaques. Des facteurs antigéniques, comme les infections streptococciques, sont souvent impliqués. Les formes sévères sont rares, mais constituent un sous-groupe distinct caractérisé par un début d'atteinte précoce (dès les premiers mois de vie), une fréquence élevée de formes pustuleuses, et une résistance accrue aux traitements classiques et innovants. Des formes sévères peuvent être associées à des troubles immunitaires ou à des déficits immunitaires. Ces cas posent des défis spécifiques : meilleure compréhension physiopathologique (recherche de particularités immunologiques et de facteurs environnementaux), adaptation des traitements lourds à l'âge pédiatrique, et utilisation à long terme de la biothérapie. L'étude mentionne un cas de psoriasis pustuleux chez une fille de 9 ans.

2. Influence de la Grossesse sur l Évolution du Psoriasis

La grossesse a un impact significatif sur l'évolution du psoriasis, avec un effet majoritairement favorable. 56 à 63 % des femmes enceintes rapportent une amélioration de leur psoriasis, tandis que seule une aggravation est observée chez 23 à 26 %. Cette amélioration est corrélée au taux d'œstradiol ou au ratio œstrogènes/progestérone. Les mécanismes précis de cette influence bénéfique ne sont pas totalement élucidés, mais pourraient être liés à des modifications immunitaires per-gestationnelles (switch Th2 et/ou rôle des TReg) en plus du rôle hormonal. À l'inverse, des poussées de psoriasis sont observées en post-partum chez 87 % des femmes. Une maladie pustuleuse aiguë rare, l'impétigo herpétiforme, peut survenir pendant la grossesse. Bien que sa classification reste débattue, plusieurs auteurs la considèrent comme une poussée de psoriasis pustuleux. Elle peut s'accompagner d'hypocalcémie, souvent secondaire à une hypoalbuminémie inflammatoire. Malgré l'indication habituelle des traitements locaux pour les formes peu sévères, des données récentes suggèrent que les patients atteints de psoriasis sévère ne devraient pas être exclus de ces traitements, en association avec d'autres thérapies.